En pleine journée, avec suffisamment de lumière, la photographie parait un jeu d’enfant, même en mode automatique : on déclenche et c’est bon (ou presque…). Par contre, dès que la lumière vient à manquer, on se retrouve très vite avec des photos ratées, même en utilisant le mode automatique de l’appareil, qui actionne presque toujours le flash interne de l’appareil pour un rendu vraiment peu satisfaisant.
Comment réussir ses photos de portrait en faible lumière ? C’est ce que nous allons voir aujourd’hui dans ce Mercredi Pratique.
Sommaire
Tout est question de lumière
On le rappelle : en photographie, tout est question de lumière. En situation de faible lumière, par exemple pour des photos en intérieur, deux choix s’offrent à vous : créer cette lumière manquante ou adapter les réglages de votre appareil photo pour capter un maximum de lumière disponible, aussi faible soit-elle.
Utiliser un objectif lumineux à grande ouverture (comme f/1.8)
On a tendance à dire que n’importe quel appareil + objectif peut permettre de réaliser une bonne photo lorsque la lumière est abondante, mais c’est lorsque les conditions de prise de vue sont plus difficiles, avec très peu de lumière, que du matériel photo (pas forcément coûteux) devient important.
Pour photographier en faible condition de lumière, mieux vaut utiliser un objectif lumineux. Quand on parle d’objectif lumineux, on parle de sa capacité à capter beaucoup de lumière, grâce à une très grande ouverture du diaphragme de l’objectif.
Parmi les objectifs lumineux les plus accessibles, on trouve le 50mm f/1.8 (le Nifty Fifty) qui cumule tous les avantages : qualitatif, léger, bon marché et versatile, notamment sur un appareil photo 24 x 36 ou plein format. En APS-C, c’est une optique parfaite pour réaliser des portraits rapprochés.
L’ouverture maximale à f/1.8 de cet objectif vous sera d’une grande utilité pour réaliser un portrait en faible lumière. Si l’on compare cette focale fixe avec un objectif de kit lumineux ouvrant à f/3.5, l’ouverture de f/1.8 permet de laisser rentrer 4 fois plus de lumière ! Ce petit chiffre sur votre objectif a donc une très grande incidence sur votre capacité à réaliser des photos en faible lumière.
Voici une liste des 50mm abordables par marque :
- Canon EF STM 50 mm f/1.8
- Nikon AF-S 50 mm f/1.8G
- Sony 50 mm f/1.8 pour Monture E Sony
- Pentax DA 50 mm f/1.8
- Fujifilm XF 50 mm F2 R WR
- Panasonic Lumix G 25mm f/1.7 (équivalent d’un 50mm)
- Olympus Zuiko Digital 25 mm f/1.8 (équivalent d’un 50mm)
Sur les appareils photo compacts ou bridges dont l’objectif n’est pas détachable, regardez bien l’ouverture du zoom, au grand-angle, mais aussi en zoomant. Désormais, les compacts experts offrent parfois des zooms avec une ouverture constante.
À noter que si votre appareil photo ou votre objectif dispose d’un système de stabilisation, c’est le moment d’en profiter et de l’utiliser, ce qui permettra de stabiliser votre image, à condition d’avoir un sujet statique bien entendu.
Régler son appareil correctement pour capter plus de lumière
Maintenant que vous avez l’objectif adéquat pour photographier en faible lumière, vous allez pouvoir apporter plus de lumière sur le capteur de votre appareil photo.
Le but, c’est d’obtenir une image bien exposée malgré le peu de lumière ambiante disponible. Pour cela, il faut régler son appareil photo en prenant en compte trois paramètres : l’ouverture, la vitesse d’obturation et la sensibilité ISO.
À noter : vous pouvez vérifier l’exposition dans le viseur ou à l’écran de votre appareil avec l’échelle d’exposition. Si la valeur est à -1, la photo sera sous-exposée, si à +1, elle est surexposée, et si elle est à 0, c’est bon signe.
Réglage n°1 : choisir une grande ouverture
La première chose à faire, c’est de choisir l’ouverture la plus grande possible de votre objectif.
L’ouverture c’est le trou formé par le diaphragme de l’objectif, qui laisse passer plus ou moins de lumière. Plus l’ouverture est grande, plus ce trou est grand et donc plus la quantité de lumière qui passe est importante.
Avec un objectif lumineux (comme un 50mm f/1.8 présenté plus haut), la profondeur de champ de votre image sera très faible à f/1.8. Le point de netteté sera donc extrêmement précis et limité à quelques centimètres de profondeur. Il vous faudra donc bien faire attention à la mise au point de votre photo, quitte à vérifier à l’écran en zoomant sur l’image pour voir si votre sujet est net.
Astuce : ne faites pas confiance à l’écran arrière de votre appareil photo pour juger de la réussite d’une photo :
- l’écran arrière est toujours très lumineux (surtout en faible lumière ambiante) et la photo semble toujours plus nette à l’écran qu’en vrai
- zoomez sur la photo pour voir les détails et regardez l’histogramme pour voir si votre photo est bien exposée.
Attention également si vous réalisez des portraits de plusieurs personnes : si elles ne sont pas exactement sur le même plan, certaines personnes risquent d’être floues. À choisir, faites donc en sorte qu’elles soient exactement à la même distance que vous. Si vous ne pouvez pas, il faudra donc choisir une ouverture plus petite, afin d’augmenter la profondeur de champ. Mais en faisant cela, vous allez réduire la quantité de lumière touchant le capteur, alors vous devrez changer vos réglages ou apporter plus de lumière, pourquoi pas à l’aide d’un flash externe (lire plus bas).
En faibles conditions de lumière, il est également possible que l’objectif « patine » pour faire la mise au point, car il n’a pas assez de lumière pour cerner la scène. L’assistant AF (la petite lampe orange qui clignote quand vous faites la mise au point) sera très utile, mais il est également possible de passer en mise au point manuelle pour une précision plus grande. C’est d’autant plus vrai si vous utilisez un hybride avec viseur électronique et doté du focus peaking, une fonction permettant de révéler dans le viseur les contours des zones qui sont nettes.
En mode priorité ouverture, vous allez ainsi pouvoir fixer l’ouverture et dire à l’appareil d’adapter la vitesse et la sensibilité ISO pour obtenir une exposition correcte. Mieux vaut par contre contrôler les autres réglages, comme présentés plus bas, voire à passer en mode manuel afin de pouvoir forcer un réglage de vitesse et d’ISO convenable pour un portrait.
Réglage n°2 : choisir une vitesse d’obturation plus lente
Le second réglage à prendre en compte est la vitesse d’obturation. Plus la vitesse d’obturation est lente, plus votre capteur est exposé à la lumière, et donc plus votre photo sera lumineuse.
En condition de faible lumière, vous devrez donc utiliser une vitesse d’obturation plus lente (on parle aussi d’augmenter le temps de pose, comme pour un gâteau qui cuit) afin d’exposer correctement votre photo.
Par contre, en réduisant votre vitesse d’obturation, vous allez amplifier les risques de flou : flou de bougé et flou de mouvement. Le flou de bougé correspond au flou du photographe qui bouge ou tremble lorsqu’il déclenche, alors que le flou de mouvement correspond au flou généré par le sujet qu’il photographie qui n’est pas complètement immobile.
Pour effectuer un portrait en faible lumière, il faut donc de préférence photographier un sujet qui bouge peu, voire pas du tout, et bien stabiliser son appareil photo lors du déclenchement.
Si l’on cherche à photographier en extérieur un bâtiment, ce n’est pas gênant, mais pour un portrait il vaut mieux conserver une vitesse assez rapide.
Il existe une règle simple à retenir, que l’on appelle « la règle de l’inverse », qui est la suivante : à une focale donnée (X mm), ma vitesse ne doit pas passer sous 1/X s. Par exemple, avec un objectif 50mm, ma vitesse ne doit pas être inférieure à 1/50s, ou je risque d’avoir des flous de bougé liés à mes mouvements (tremblements, respiration, etc.)
Cette règle de l’inverse de la focale a été créée pour les appareils 24×36 et plein format. Avec un appareil doté d’un capteur plus petit comme les APS-C, il faut prendre en compte le coefficient multiplicateur (1,5x ou 1,4x selon le fabricant) et ainsi utiliser une vitesse un peu plus rapide. Dans l’exemple au 50mm, il faudra ainsi ne pas descendre sous 1/75s pour éviter les mouvements.
Bien sûr, cette règle n’est pas gravée dans le marbre : si votre appareil photo dispose d’une stabilisation optique ou du capteur, vous pouvez choisir une vitesse plus lente. Et si vous souhaitez réaliser un portrait d’une personne en mouvement en faible lumière, il faudra choisir une vitesse plus rapide, quitte à augmenter les ISO.
Réglage n°3 : augmenter la sensibilité ISO
Si malgré une grande ouverture et une vitesse adaptée, vous obtenez une photo trop sombre, il existe un troisième paramètre sur lequel vous pouvez jouer, la sensibilité ISO. Il va vous falloir augmenter la sensibilité ISO de l’appareil pour rendre le capteur plus sensible à la lumière. Pour une même vitesse d’obturation et ouverture, doubler la valeur ISO permet de doubler la quantité de lumière que le capteur perçoit.
Par contre, la sensibilité ISO est difficile à gérer : plus vous montez en ISO, plus la qualité de votre image se détériore. Chaque appareil photo (et capteur) se comporte différemment face aux ISO, il vous faudra donc faire quelques essais pour voir jusqu’à quelle sensibilité ISO la qualité reste acceptable. Cela dépend également de l’usage de la photo : pour du web, le bruit numérique est plus acceptable que pour un agrandissement.
Sur mon premier reflex APS-C, je ne dépassais quasiment jamais 800 ISO. Maintenant, les appareils se sont bien améliorés et il est facile d’aller à 1600 ISO tout en obtenant un résultat correct.
En augmentant les ISO, vous allez également modifier la colorimétrie de l’image : de hauts ISO donnent généralement une dominante magenta à l’image en raison du bruit chromatique. Dans certains cas, l’usage du noir et blanc permet de pallier ce problème.
Photographier en RAW ou JPEG ?
En conditions de faible lumière, faut-il photographier en RAW ou en JPEG ? Ici, les avis sont partagés :
- d’un côté, le RAW offre une latitude de retouche bien plus importante et permet de corriger l’exposition de l’image, malgré un bruit brut non traité
- de l’autre, le JPEG offre une version prête à l’emploi, où le processeur de l’appareil a corrigé le bruit généré par les hauts ISO et a accentué les détails.
Certains boîtiers produisent des JPEG plus propres que d’autres, comme c’est le cas chez Fujifilm, et il faudra ici encore une fois passer par quelques tests pour voir comment votre appareil se comporte.
Utiliser un flash externe pour apporter de la lumière
Si, malgré tout, les conditions lumineuses sont trop mauvaises pour obtenir un rendu correct en utilisant une grande ouverture, une vitesse contrôlée et de hauts ISO – autant dire, il fait bien noir – vous pouvez utiliser le flash de votre appareil photo (ou mieux, un flash externe déporté) pour éclairer votre scène.
Évitez à tout prix le flash interne de votre appareil photo, car sa petite taille et sa position juste au-dessus de votre objectif donne une lumière vraiment peu flatteuse. C’est pratique pour déboucher les ombres d’une scène en contre-jour, mais ce n’est vraiment pas adapté pour être utilisé comme lumière principale pour un portrait, car l’arrière-plan sera noir et votre sujet ne sera pas du tout mis en avant.
Préférez utiliser un flash déporté (ou flash cobra) que vous pouvez garder monté sur votre appareil photo, mais que vous orienterez vers un mur ou un plafond afin de créer un diffuseur géant. Dans ce cas, votre plafond ou votre mur deviendra votre source de lumière principale, et sa grande taille permettra d’obtenir un rendu naturel.
Le flash peut également vous permettre de créer des effets intéressants, comme ces traits de lumière que l’on a l’habitude de voir sur les photos de soirées. Cet effet est obtenu en utilisant le flash de l’appareil photo couplé à une pose très longue, de plusieurs secondes. Le flash va exposer correctement le visage et la pose longue va capturer le flou (et notamment les lumières) lors des secondes restantes.
Apportez une lumière d’appoint : soyez ingénieux
Si vous n’avez pas de flash avec vous, il est possible de se débrouiller autrement. Tentez de rapprocher votre sujet près d’une lumière un peu plus forte. Même si c’est une simple lampe de chevet ou une lampe qui illumine la rue depuis la fenêtre, cette lumière supplémentaire peut suffire.
De nuit, dans la rue, cela peut vous permettre de réussir des portraits en rapprochant votre sujet des vitrines illuminées des magasins. Attention par contre à la chaleur de la lumière, les éclairages sont généralement assez froids.
S’il existe de petits panneaux LED très utiles pour servir de lumière d’appoint, notamment en vidéo, vous pouvez également utiliser votre smartphone pour illuminer une scène, soit en allumant la LED du flash à l’arrière, soit en utilisant un fond blanc (une image blanche) à l’écran avec la luminosité au maximum. Je ne vous garantis pas un résultat exceptionnel, mais cela peut dépanner.
Pensez simplement à une chose lorsque vous éclairez votre sujet : évitez de placer la source de lumière juste au-dessus de votre appareil photo, afin de pouvoir modeler un peu les ombres sur le visage de votre modèle.
Soyez créatifs
Le dernier conseil que je vous donne, c’est d’être créatif : s’il n’y a pas assez de lumière pour un portrait, où que vous êtes mal placé par rapport à cette lumière, soyez créatifs. Il est possible de créer de petits réflecteurs en papier ou carton pour les flashs internes afin de renvoyer la lumière vers le plafond même sans flash cobra. Si un sujet a une lumière forte en arrière-plan, pourquoi ne pas le photographier en contre-jour en sous-exposant volontairement l’image ?
Toutes ces astuces vous permettront de ne plus rater vos portraits lors des fêtes, des événements ou autres situations où la lumière se fait rare.