© Agnès Mallez - Portrait de Robin Santus

Interview de Robin Santus, amateur d’appareils télémétriques

Lorsque l’on voyage, on fait toujours de belles rencontres. Perdu au beau milieu de l’Islande, sur une plage de sable noir, un DC3, avion américain écrasé depuis la Guerre Froide. C’est là où j’ai rencontré Robin Santus et Agnès Mallez, deux photographes français. On aurait dû se douter que ce lieu était le rendez-vous des photographes, mais le hasard fait bien les choses. Après les avoir recroisé à Reykjavik, il fallait que l’histoire continue, et je donne la parole à Robin qui va vous parler de sa vie de photographe, de son amour pour les appareils photos télémétriques et de ses projets.

Bonjour Robin, avant de commencer, présente-toi en quelques mots

Robin Santus, 52 ans, je suis Technicien Biologiste dans la vie professionnelle. La photographie, la musique et ma famille constituent en quelque sorte la face cachée de la Lune.

Chevrolet - Arizona / New Mexico - Leica M9 + Summilux 1.4/50 mm Asph
Chevrolet – Arizona / New Mexico – Leica M9 + Summilux 1.4/50 mm Asph

Depuis quand fais-tu de la photo, quelles ont été les étapes importantes pour toi dans ton apprentissage ?

Mon père faisait un peu de photographie. Il a fait de superbes images de la Norvège dans les années 50, à une époque où peu de touristes s’aventuraient jusque là. Adolescent, je commence à faire des images en utilisant son Semflex !

Puis plus tard je rencontre Francesco Hidalgo à Venise. C’était en 1991 pendant le traditionnel Carnaval. C’était à l’époque un des rares photographes que je connaissais car on m’avait offert un livre sur New-York … Dont il était l’auteur. Il m’invite à rejoindre le Club Photographique de Paris, les « 30X40 » en 1991. Pendant 10 ans, je vais apprendre essentiellement en regardant les travaux des photographes qui viennent s’exposer et expliquer leur démarche (Harry Gruyaert, Willy Ronis, Marie-Paule Nègre, Dolorès Marat, Jeff Dunas, Yan Morvan, Daniel Lebée, Bernard Descamps, et bien d’autres…).

Je perfectionne également ma technique auprès de Ralph Gibson (1994), Martin Parr (2002) puis Raymond Depardon (2003) avec lesquels j’étudie lors de workshops en Arles.

Quel est ton meilleur souvenir de photographe ?

Un meilleur souvenir ? Impossible de choisir…

La première fois que j’ai vu une image apparaitre dans le révélateur ? Ma première exposition à Brioude ? Lorsque j’ai été invité à exposer à Ténériffe pour la biennale PhotoNoviembre ? Mes prix à Arles lors des Rencontres de la Photographie ou le 1er Prix Noir et Blanc Ilford en 2011 ? Ma rencontre avec Jean-Loup Sieff ? Ou simplement les soirées photographiques entre amis …

Prix Ilford 2011 : le verre sur le piano à New-york (Leica M6 + Summicron 2/35 mm version III).
Prix Ilford 2011 : le verre sur le piano à New-york (Leica M6 + Summicron 2/35 mm version III) – © Robin Santus

Quels sont les sujets qui te plaisent actuellement, et sur quoi travailles-tu ? (si tu me parles d’une série, je veux bien un lien pour te poser une question relative à cette série)

En ce moment, je me concentre essentiellement sur la photographie urbaine ou de paysage. Je peaufine les images que j’ai réalisées en Islande en septembre dernier. J’ai également débuté une série assez ludique le week-end dernier en Baie de Somme en m’obligeant à n’utiliser que la pleine ouverture de mon objectif (f/1.4).

FJALLSJOKULL_Rock
Fjallsjökull – Islande – Leica M9 2.8/28 mm Asph + filtre gris
SELJANLANDFOSS
Seljanlandfoss – Islande – Leica M9 2.8/28 mm Asph + filtre gris
SKOGAFOSS
Skógafoss – Islande – Leica M9 2.8/28 mm Asph + filtre gris
BaiedeSomme_pleine ouverture
Le Hourdel (Baie de Somme) faite à f/1.4 – LEICA M9 + 1.4/50 mm Asph

Mon travail pour être consulté sur mon website Robinsantus.com.

Quel matériel utilises-tu et comment vois-tu l’évolution actuelle du marché ?

Je n’utilise plus que des appareils photos de type télémétriques. Un Leica M9 pour le numérique et un Mamiya 6 en argentique. J’ai très peu d’optiques. J’aime partir en voyage avec un seul objectif (généralement un 35 ou 50 mm). Exceptionnellement en Islande, sachant que les paysages seraient grandioses, j’ai pris un 28 mm.

SAIGON-quartier-chinois-NB
Quartier chinois de Saïgon – Mamiya M6 + 50mm f/4

J’observe l’évolution du marché avec un œil curieux. Les appareils numériques ont fait de tels progrès que je ne vois pas trop comment ils peuvent encore évoluer ? Quand on a une telle dynamique, un capteur de 18 ou 24 Mpx et la possibilité d’utiliser 12.800 isos (ce que je ne fais jamais d’ailleurs), je ne vois pas trop quoi demander de plus… Par contre la réédition de belles optiques (comme le fait Voigtlander, par exemple) me séduit davantage.

Quand à l’argentique, c’est un réel plaisir aujourd’hui de pouvoir s’acheter des boitiers dont on avait rêvés il y a quelques années à des prix dérisoires (ou presque …).

Qu’est-ce qui te plait tant dans les appareils télémétriques ?

Plusieurs choses me plaisent dans les télémétriques. Ce sont des appareils très silencieux, ce qui n’est pas négligeable. Ensuite ils te permettent de garder le contact avec ton sujet au moment où tu photographies ce qui est fondamental en street photography. Le fait qu’ils ne possèdent pas de miroir diminue les vibrations au moment du déclenchement. Des poses à main levée au 1/15 de seconde sont alors envisageables. Si de plus tu as la chance d’avoir des optiques lumineuses, tu peux alors travailler en basse lumière sans monter en ISO. Si avec ça, je ne t’ai pas convaincu … Rires …

Le gardien du Temple de le Littérature à Hanoï - LEICA M9 + Summicron 2./35 mm Asph
Le gardien du Temple de le Littérature à Hanoï – LEICA M9 + Summicron 2./35 mm Asph
Des joueurs à Cholon - quartier chinois de Saïgon - LEICA M9 + Summicron 2./35 mm Asph
Des joueurs à Cholon – LEICA M9 + Summicron 2./35 mm Asph

Avec Thomas Chauvin, tu es également à l’origine du webzine FLASH!, peux-tu nous en dire un peu plus ?

Thomas a travaillé dans mon entreprise. C’était la première fois que je rencontrais quelqu’un qui connaissait mon travail photographique ! Nous nous sommes liés d’amitié et nous avons envisagé de réaliser quelque chose ensemble (exposition ?). Puis l’idée de créer un webmagazine s’est rapidement imposée à nous.

Mon fils Florian, graphiste (et maintenant tatoueur) nous a fait la maquette et ma compagne, Agnès Mallez, s’est formée à un logiciel de mise en page. Pour les 2 ans du magazine, mon fils cadet, Julian étudiant en Ecole d’Art Appliqué, a repris la maquette initiale pour la faire évoluer spécialement pour cet événement.

couverture du numéro 4 du webzine FLASH
Couverture du numéro 4 du webzine FLASH

Vous pouvez retrouvez le webzine FLASH! à cette adresse.

Comment trouves-tu les artistes que tu souhaites présenter dans ce webzine ?

Il y a plusieurs façons de les recruter.

Soit, ce sont des connaissances, soit ce sont des photographes recrutés sur le web. Après concertation (car tous ceux que nous publions répondent à l’unique critère d’un véritable «coup de cœur »), nous les contactons. FLASH ! étant volontairement un webzine gratuit et réalisé bénévolement, nous leur demandons d’offrir leurs images et de rédiger un texte d’accompagnement. Nous n’avons jamais eu de refus ! C’est un peu notre fierté …

Depuis quelques temps il y a même de plus en plus de photographes qui nous contactent et nous proposent d’y exposer leur travaux. C’est très encourageant et nous les en remercions chaleureusement.

Après le numéro 6, nous avons fait le constat que peu de photographes féminins avaient été publiées et nous avons décidé de leur consacrer un numéro exclusif afin de rétablir un certain équilibre. C’est un numéro particulièrement réussi …

FLASH! est uniquement disponible au format PDF ou est-il possible de se le procurer au format papier ?

Nous avons mis 3 numéros en vente sur Blurb. Les numéros ont été redimensionnés exprès pour l’édition papier et sont disponibles sous forme « livre » ou « magazine ». Ils sont bien sûr vendus à prix coûtant afin de respecter le concept de base. L’avoir dans les mains offre une nouvelle dimension au webzine.

Pour ceux qui seraient intéressés, retrouvez le webzine sur Blurb.

Des projets ou des idées pour l’année 2015 ?

De mon côté, je vais continuer à promouvoir les galeries qui diffusent mon travail (L’œil Ouvert, 74 rue François Miron à 75004 Paris) ainsi que le tout nouveau site de vente photographies d’auteurs en ligne Eidonis crée par une photo-copine.

Avec Thomas, nous envisageons de prendre un stand lors de la foire de Bièvres afin de présenter FLASH ! à un plus large public et bien sûr montrer nos derniers travaux.

Ed Sandoval - Arizona / New Mexico - Leica M9 + Summilux 1.4/50 mm Asph
Ed Sandoval – Arizona / New Mexico – Leica M9 + Summilux 1.4/50 mm Asph

Le mot de la fin

J’ai beaucoup donné à la photographie, mais elle me l’a bien rendue !

Une façon merveilleuse d’écrire sa vie mais aussi de faire des rencontres, comme la nôtre, sur une plage déserte d’Islande autour de la carcasse d’un vieux DC3 … Merci Damien !

DC3 écrasé sur une plage de sable noir en Islande

Image de couverture : Robin Santus photographié par Agnès Mallez.

Merci Robin pour cette interview. Pour découvrir le reste de son travail, vous pouvez le retrouver sur son site web.