© Samuel Fosso courtesy Jean-Marc Patras / Paris

Tati de Samuel Fosso : le virtuose de l’autoportrait à la galerie Christophe Person

Samuel Fosso, photographe africain et contemporain reconnu pour ses autoportraits extravagants, est désormais représenté par la galerie Christophe Person. Une première exposition est ainsi organisée afin de mettre en avant le travail du photographe. Sa série Tati, réalisée en 1997, est à découvrir à partir du 16 mai et jusqu’au 10 juin 2023.

Samuel Fosso
Autoportrait – Serie « Tati », La bourgeoise 1997 © Samuel Fosso courtesy Jean-Marc Patras / Paris

Samuel Fosso : pionnier de l’autoportrait

Né en 1962 au Cameroun, Samuel Fosso, survivant de la guerre civile du Nigéria, se lance dans la photographie à tout juste 13 ans. Il ouvre un studio photo en République Centrafricaine et réalise des portraits, des photographies de groupes ou d’événements. Pour finir ses pellicules, il se déguise, se met en scène, et se capture tel un photographe de mode, dans des postures et tenues plus extravagantes les unes que les autres. En 1994, il remporte le premier prix des Rencontres de Bamako pour son travail photographique. Il se spécialise très vite dans l’autoportrait, un art dont il est l’un des pionniers, qu’il manie à sa façon.

Les années passent et le photographe multiplie les séries et les expositions à travers le monde : la Tate Modern, le MoMA, le centre Georges Pompidou, le Musée du Quai Branly – ou encore la MEP il y a tout juste un an. Pourtant, il n’avait encore jamais été présent sur le marché de l’art et représenté en galerie. Aujourd’hui, l’artiste et son agent historique Jean-Marc Patras ont choisi d’être représentés par la galerie Christophe Person.

« Samuel Fosso est un artiste historique et visionnaire et a toujours fait figure de pionnier. C’est un honneur pour notre galerie de présenter le travail iconique de Samuel Fosso qui, 25 ans avant l’engouement actuel du marché pour le Black Portrait, a été le premier artiste à déconstruire la vision exotique du corps noir », indique Christophe Person dans un communiqué.

Samuel Fosso
Autoportrait – Serie « Tati », Le business man 1997 © Samuel Fosso courtesy Jean-Marc Patras / Paris

Tati, l’art de déguiser un propos

Une exposition est donc organisée du 16 mai au 10 juin afin de célébrer cette nouvelle collaboration. L’occasion de revenir sur le travail de ce photographe hors du commun.

Sa célèbre série Tati sera donc mise à l’honneur pour la première fois au sein d’une galerie. Réalisée en 1997 pour les 50 ans de la célèbre enseigne, cette série avait permis au photographe de confirmer son internationalisation et d’ouvrir le monde à la photographie africaine. Pourtant, la série n’était initialement pas censée être telle que l’on connaît aujourd’hui.

En effet, l’enseigne avait invité trois photographes, Seydou Keita, Malick Sidibé et Samuel Fosso, à créer un studio au sein de la boutique afin de tirer le portrait des clients, en noir et blanc, à la manière des studios africains. Mais, sûr de lui, Samuel Fosso refuse le projet et prend une tout autre direction. Il réalise alors une série de 10 autoportraits en couleurs, dans laquelle il convoque autant de personnages singuliers .

Allant de la bourgeoise au rocker ou du businessman au pirate, le photographe crée des tenues et des personnages uniques, grâce à un assemblage judicieux et parfois extravagant de vêtements, d’accessoires et d’objets vendus par le magasin. Grâce aux habits, éléments majeurs du travail de l’artiste, Samuel Fosso se déguise en des personnages tirés du monde réel ou de son imaginaire – qu’il capture et immortalise à travers son objectif.

Samuel Fosso
Autoportrait – Serie « Tati », Le Chef (celui qui a vendu l’Afrique aux colons), 1997 © Samuel Fosso courtesy Jean-Marc Patras / Paris

Pourtant, plus qu’un ensemble d’autoportraits et de déguisements, la série Tati est une véritable fresque de personnage aux enjeux socio-culturels. Le photographe mobilise en effet de nombreux clichés afin de faire passer un message profondément politique. Le grotesque devient ainsi acte de dénonciation, à travers des personnages riches en symboles. Sa photographie Le golfeur est ainsi une parodie du monde occidental, tandis que Le petit marin n’est pas sans analogie avec le bombardement de Pearl Harbor. Sans oublier son cliché « Le Chef (celui qui a vendu l’Afrique aux colons) », où le grotesque sert à critiquer vertement la colonisation.

À travers des autoportraits et des déguisements aux airs comiques – mais au sous-texte d’une grande richesse –, Samuel Fosso réalise une véritable satire sociale dans sa série Tati. Ces clichés seront exposés à la galerie Christophe Person jusqu’au 10 juin 2023.

Informations pratiques :
Tati de Samuel Fosso
Galerie Christophe Person
Du 16 mai au 10 juin
39 rue des Blancs Manteaux, 75004 Paris
Du mercredi au samedi de 14h à 19h
Entrée libre et gratuite