Polaroid Kid de Mike Brodie : portrait d’une jeunesse américaine à la marge

C’est un drôle d’objet que publie actuellement Stanley/Barker : une boîte grise en carton sérigraphiée avec, à l’intérieur, une cinquantaine de polaroids. Ils sont signés Mike Brodie, sorte d’aventurier des temps modernes qui est parti de chez lui à 17 ans pour traverser les États-Unis, plus ou moins clandestinement, et ce durant une dizaine d’années.

© Mike Brodie, Stanley/Barker

Après la publication du livre de Tod Papageorge, la maison Stanley/Barker poursuit son travail éditorial autour du modèle américain et de ses marges. Polaroid Kid et ses cinquante reproductions nous délivrent le véritable témoignage d’un mode de vie alternatif au début des années 2000, avec ses codes esthétiques propres – dont certains nous rappellent l’emblématique Paranoid Park, film de Gus Van Sant sorti en 2007.

© Mike Brodie, Stanley/Barker

Parfois, au verso d’un polaroid, une signature, un nom, une date… seuls indices au milieu de ce flou temporel et géographique. C’est que Mike Brodie a traversé le pays au gré des trains de marchandises, accompagnés par d’autres jeunes en fuite, ou en quête d’autre chose. Malgré un certain succès dans des galeries américaines ou parisiennes, il continue à vivre à la marge et à documenter son mode de vie alternatif. C’est ainsi qu’il offre un miroir, un reflet de la société américaine telle qu’on l’idéalise, ou tell qu’on veut la représenter.

© Mike Brodie, Stanley/Barker

Ce n’est pas anodin si sa série la plus célèbre s’intitule littéralement A Period of Juvenile Prosperity (en français, Une période de prospérité juvénile) : de quelle prospérité est-il question dans l’œuvre et la vie de Mike Brodie ? Sûrement pas d’un modèle de prospérité économique dont tous les protagonistes de ses images semblent vouloir s’extraire.

© Mike Brodie, Stanley/Barker

La pratique de Mike Brodie rappelle évidemment toute cette génération d’artistes de l’intime et de la marge, tout en développant une esthétique propre à la frontière entre photographie vernaculaire, documentaire et mise en scène revendiquée parfois burlesque. Une photographie où règnent la spontanéité et l’authenticité, tout en subtilité ; une photographie où la clandestinité, loin d’être esthétisée, se vit et se voit avec une certaine beauté, et fait ainsi coexister les difficultés de la vie alternative et, surtout, la joie et l’exaltation qu’elle procure.

© Mike Brodie, Stanley/Barker

Polaroid Kid, Mike Brodie
Éditeur : Stanley/Barker
62 €, 50 polaroids dans un étui en carton gris sérigraphié sur mesure, fermé par un élastique épais, 13 x 17 cm
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