Le Musée des Confluences organise une grande exposition autour de Marc Riboud. L’institution lyonnaise met en lumière cent clichés du photographe-voyageur pour célébrer le centenaire de sa naissance. En collaboration avec les amis de Marc Riboud, le Musée des Confluences revient sur le parcours du photographe baroudeur au travers de photographies inédites prêtées en partie par le fonds photographique du musée national des arts asiatiques – Guimet. À découvrir jusqu’au 31 décembre 2023.
Membre de l’agence Magnum Photos et reporter de renom, Marc Riboud (1923-2016) a parcouru le monde et documenté une grande part des transformations sociétales de la deuxième moitié du vingtième siècle, laissant derrière lui une œuvre riche des récits individuels et collectifs d’une époque.
Sommaire
Un voyage initiatique à travers l’œuvre de Marc Riboud
Après l’exposition Le Japon en duo à la Galerie le Réverbère, qui mettait en résonnance certains des travaux de Géraldine Lay et ceux Marc Riboud, ce dernier est mis à l’honneur par une grande exposition organisée par le Musée Confluences à l’occasion du centenaire de sa naissance à Lyon – à Lyon, et plus précisément à Saint-Genis-Laval.
D’emblée, l’exposition nous propose dès notre arrivée d’entrer dans l’univers d’un voyage. La scénographie crée un cheminement qui nous transporte au travers des clichés emblématiques de l’œuvre de Marc Riboud. L’analyse de l’œuvre et du parcours du photographe prime sur la chronologie, même si les liens avec les grands changements sociétaux et évènements d’époque sont mis en exergue.
À travers les différents espaces, on est amené dans un nouvel univers chromatique, qui
nous signale une nouvelle étape dans le voyage de Marc Riboud, et dans notre propre parcours de découverte.
Les tirages sont mis en valeur par la scénographie colorée, mais leur exposition est épurée : ils sont accrochés sans cadre ni bordure, pour que l’on ne se concentre que sur la photographie et son pouvoir de transmission. On marche en étant transporté dans une narration, un récit d’aventures dont seul le photographe détient le scénario initial. Le pouvoir de l’art est bien celui-ci : à travers l’expérience subjective du photographe, chacun peut revivre ses propres émotions, ou des expériences nouvelles, et porter sur les images un regard qui sera toujours inédit.
Le grand départ
L’exposition rappelle tout d’abord les points initiateurs du parcours du photographe reporter. Marc Riboud était introverti et silencieux, mais son audace et son courage n’en était pas moins grands. A Lyon, après le départ d’un frère et de certains amis vers les camps, il avait tout de suite rejoint la Résistance, dans le maquis du Vercors. Alors âgé de 21 ans, il s’engage avec deux autres amis de la Maison des étudiants catholiques.
C’est dans les années 1950 qu’il décide de partir vers de nouveaux horizons à bord de sa Land Rover, afin de capturer les spécificités d’autres cultures, des visages et des silhouettes différentes.
En effet, même s’il est un grand amant de la géométrie et des structures architecturales, le photographe s’intéresse également de près aux personnes, à leurs histoires, et aux expressions humaines. Il partage cette approche avec ses collègues photographes Henri Cartier-Bresson et Robert Capa, qui comme lui ont eu leurs périodes d’évasions lointaines afin d’immortaliser d’autres formes d’expériences humaines. Mais le photographe avait sa manière de voyager, et sa conception de l’aventure.
La lenteur comme gage d’expériences profondes
Attiré par l’extrême orient, Il ira jusqu’à Calcutta où il restera un an, avant de passer plusieurs mois en Chine. Marc Riboud était en effet un partisan de la lenteur dans le voyage. Il aurait eu du mal à comprendre et accepter les rythmes de voyages frénétiques de nos sociétés actuelles.
Il aimait prendre le temps de connaître, d’écouter les personnes, et de transmettre des images issues avant tout de rencontres singulières. Le photographe était curieux, il aimait se laisser guider par les récits des personnes rencontrées, et le hasard du voyage.
Cette vision ressort des clichés du photographe, qui semblent toujours écrire les pages d’un roman d’aventures, ou d’un film aux multiples rebondissements.
Les grands évènements internationaux
Dans sa vie professionnelle et personnelle, souvent très liées, Marc Riboud a vécu les grands évènements de l’époque : l’indépendance des colonies françaises, la guerre du Vietnam, ou encore la révolution iranienne.
Il choisit de photographier les personnes qui se battent pour leur liberté, qui résistent, en écho à sa propre résistance durant la période nazie. Comme lorsqu’il retourne dans le Vercors des années après la guerre, il aime retourner dans les lieux, voir leurs changements à long terme, connaître les effets profonds des grands évènements sur les sociétés. Il disait d’ailleurs : « Les lieux sont comme des amis, j’ai envie de les retrouver, de savoir s’ils ont changé, ce qu’ils deviennent. »
Avec les photographies de Marc Riboud, les murs de Confluences revêtent tout le poids de l’Histoire internationale mais aussi ses apprentissages. On est porté à réfléchir aux moyens de la liberté, aux formes des révoltes, mais aussi au prix de la répression.
Marc Riboud : l’art de la composition
La composition des photographies de Marc Riboud apparaît tout à la fois authentique, sans artifice, et millimétrée. C’est toute la particularité de l’œuvre du photographe reporter qui, amant du noir et blanc, s’est exercé à la couleur afin de rendre compte des paysages les plus picturaux comme ceux de Huang Shan.
Même dans ses portraits, on reconnait l’attention au détail et l’amour de la géométrie. Les lignes y sont toujours travaillées, et les visages ou les mouvements émergent avec évidence de l’environnement même lorsqu’il est chaotique.
Comme dans l’art picturale, le sujet de la photographie détermine la manière de voir son contexte. Et c’est à travers lui que l’on compose ce qui l’entoure.
L’exposition, dans la diversité des photographies proposées, donne à voir un spectre large de l’œuvre de Marc Riboud, et rend compte tout autant de ses capacités formelles que de ses qualités humaines.
À la fin du cheminement de l’exposition, les visiteurs entendent la voix du photographe, qui anime une image de paysage disparaissant dans la brume. L’itinéraire à travers l’œuvre se conclut ainsi avec la voix de celui qui a tant vu, et qui a toujours su transpercer les sujets photographiés, et capturer les émotions, les non-dits, les silences ou au contraire les vacarmes qui se cachent derrière une fossette ou une expression figée.
Informations pratiques
Marc Riboud, 100 photographies pour 100 ans
Musée des Confluences
86 Quai Perrache, 69002 Lyon
Mardi à dimanche – 10h30 à 18h30
Nocturne le 1er jeudi du mois jusqu’à 22h
Ouvert exceptionnellement le lundi de Pâques et le lundi de Pentecôte de 10h30 à 18h30