En novembre 2021, Canon dévoilait un objectif 100-400 mm ultra-léger et compact pour ses hybrides en monture RF. Le Canon RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM est le premier objectif de la marque en monture RF visant à offrir des focales très longues au grand public et ceci avec un tarif et un encombrement très réduits. Il rejoint une série de téléobjectifs à la fois poids plume et premier prix (avec les 600mm f/11 et 800mm f/11). Que vaut la dernière innovation en date ? Nous avons pu utiliser cet objectif pendant de nombreuses semaines et voici notre test complet du Canon RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM.
Sommaire
Présentation du Canon RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM
La monture RF a seulement 3 ans mais Canon est résolu à en faire un pilier du monde de la photo. À cette date, pas moins de 22 objectifs sont disponibles, avec une roadmap tout aussi ambitieuse. Amateurs comme professionnels peuvent se réjouir de voir autant d’innovations de la part du géant japonais – c’est un rythme de développement assez impressionnant.
Depuis le lancement de l’EOS R, nous constatons que pour Canon, innovation va de pair avec prise de risque. La monture RF a redéfini les codes : un zoom f/2 constant, des 70-200 « miniatures », des focales fixes avec une fonction macro et désormais, des téléobjectifs beaucoup plus compacts et abordables (600mm f/11, 800mm f/11 et 100-400mm f/5,6-8).
Proposé à 749 €, l’objectif Canon RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM devient l’alternative « abordable » face au Canon RF 100-500 mm f/4,5-7,1 L IS USM commercialisé à 3099 €. Idéal pour les photographes voulant voir loin, très loin (photo d’animaux, photo de détails), il est compatible avec les nouveaux Canon EOS R7 et EOS R10 sur lesquels il offrira un équivalent 160-640 mm pour encore plus de portée. Attention toutefois, la contrepartie de ce tarif attractif est clairement annoncée dans le nom : une ouverture maximale loin d’être impressionnante.
Canon fait un choix assumé de proposer un objectif qui a davantage vocation à être utilisé en extérieur en pleine journée… et ceci perturbe certainement nos habitudes. Si on regarde de plus près cette ouverture glissante, on constate que l’objectif « ferme » rapidement son diaphragme :
- f/5,6 n’est disponible qu’entre 100mm et 110mm
- f/6,3 entre 110mm et 150mm
- f/7,1 entre 150mm et 250mm
- f/8 entre 250mm et 400mm
En pratique, on pourrait se plaindre que l’ouverture à f/5,6 ne soit accessible que sur une plage focale très, très restreinte (100 à 110 mm seulement). D’un autre côté, une ouverture maximale de f/5,6 à f/8 n’est que 2/3 IL à 100mm et 1 IL à 400mm plus sombre que la version L, incarnée par le Canon RF 100-500 mm f/4,5-7,1 L IS USM, vendu 4 fois plus cher. Présenté de la sorte, le compromis paraît tout de suite plus digeste.
L’ouverture n’est pas le seul compromis difficiles à justifier. On déplore l’absence totale de tropicalisation et le pare-soleil seulement disponible en option. Canon reste fidèle à sa tradition sur l’intégralité des objectifs « non-L ».
Avec sa focale 100-400 mm, cet objectif vise les photographes amateurs de sports et de nature . C’est pour cet usage que Canon fait une belle entorse à sa feuille de route habituelle. Jusqu’ici, seuls les objectifs de la série L étaient équipés de moteurs USM, les autres devant se contenter de l’équivalent STM bruyant et pas toujours très vif. Pour rester crédible dans un usage sportif, Canon offre à cette optique la motorisation Nano-USM qui ravira les amateurs d’action.
La formule optique du Canon RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM repose sur 12 lentilles réparties en 9 groupes. On notera la présence d’une lentille UD (dispersion ultra-faible) et d’une lentille asphérique en verre moulé à haute précision (PMo) pour réduire les aberrations et les distorsions. Les lentilles reçoivent également un traitement Super Spectra pour améliorer la transmission de la lumière. Tout ceci est complété par un diaphragme circulaire à 9 lamelles.
Enfin, certains seront heureux de noter que le Canon RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM est compatible avec les téléconvertisseurs 1,4x et 2x. Cependant, rappelons que leur usage se fait au prix d’une perte de luminosité… sur un zoom qui n’en offre déjà pas énormément.
Voici les caractéristiques techniques du Canon RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM :
- plage focale : 100-400 mm (équivalent 160-640 mm en APS-C)
- ouverture maximale : f/5,6-8
- ouverture minimale : f/32-f/45
- construction optique : 12 éléments répartis en 9 groupes, dont une lentille asphérique et une lentille UD
- diaphragme : circulaire, 9 lamelles
- angle de champ : 20° – 5,10°
- distance de mise au point minimale :
- 1,2 m à 100 mm
- 0,88 m à 200 mm
- 0,95 m à 300 mm
- 1,05 m à 400 mm
- rapport de grossissement maximal : 0,41x
- autofocus : oui, motorisation Nano-USM
- stabilisation optique : oui
- tropicalisation : non
- diamètre du filtre : 67 mm
- dimensions : 79,5 x 164,7 mm (D x L)
- poids : 635 grammes
- monture compatible : Canon RF
Prise en main
La légèreté est la sensation dominante dès la prise en main… et on a presque du mal à s’y habituer. Il est suffisamment léger et compact pour rester très équilibré sur des boitiers plus petits comme un Canon EOS RP et un EOS R10.
Affichant 16,4 cm de long pour seulement 635 grammes, vous pourrez l’emporter partout sans vous sentir handicapé. Naturellement, le zoom ne se fait pas en interne. Comptez environ 7 cm de plus une fois l’objectif totalement déployé et encore 10 cm de plus avec le pare soleil qui vous coutera « seulement » la bagatelle de 89 €.
Le fût affiche les 3 bagues traditionnelles de Canon en monture RF. On retrouve donc une bague de commande à l’extrémité avant, à laquelle il est possible d’assigner une fonction comme le réglage de la sensibilité ISO, de l’ouverture, de la vitesse ou bien encore de la compensation d’exposition.
La bague de zoom et la bague de mise au point sont toutes les 2 aisément manœuvrables et de textures suffisamment différentes pour autoriser un usage à l’aveugle. La mise au point manuelle est probablement un peu longue pour ceux qui souhaitent s’y aventurer mais la qualité de l’assemblage est digne de ce que sait faire Canon.
Sur le coté, nous trouvons les habituels commutateurs de l’autofocus et de la stabilisation. En revanche, pas de sélecteur pour faire varier les modes de stabilisation comme sur les zooms professionnels de la gamme. Ainsi, nous n’aurons pas d’aide spécifique pour réaliser des « pannings ».
Cette absence n’est pas surprenante pour ce niveau de gamme. Toutefois, on apprécie la présence du loquet de verrouillage du zoom. Il empêche ce dernier de s’étendre lors du transport sous l’effet de la gravité, lorsque l’objectif est tenu vers le bas. Ce verrou n’est activable qu’à la position 100 mm.
Nous avons déjà mentionné l’absence de pare-soleil et de tropicalisation, il faudra aussi composer ici sans collier de trépied. L’objectif est suffisamment léger pour ne pas mettre en difficulté une rotule de trépied. Néanmoins, sa légèreté est presque un défaut car l’ensemble est très sensible à la moindre brise si vous tentez une pose longue. Les objectifs plus lourds et mieux équilibrés sur trépied sont plus fiables dans ces circonstances. Nous recommandons d’accrocher votre sac photo à votre trépied pour renforcer sa stabilité si besoin.
Globalement, nous évoluons en terrain connu. Canon reste dans une logique de gamme et ses objectifs partagent les mêmes traits de finition et d’aisance d’utilisation. On continuera de regretter l’absence de joints d’étanchéité mais à ceci près, il n’y a rien à redire.
Qualité d’image du Canon RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM
Nous avons testé cet objectif sur un Canon EOS R5 de 45 Mpx. Vous pouvez cliquer sur chaque image pour la voir en meilleure résolution.
Cet objectif représente une porte d’entrée dans l’univers des très longues focales – et ses performances doivent être appréciées en conséquence. Nous allons tout de suite préciser qu’à aucun moment il ne délivre l’acuité visuelle d’un Canon série L. Mais étonnement, il n’en est pas si loin.
À la pleine ouverture et à 100 mm, le piqué est déjà très bon dans le centre. Il est maximal à f/8 et f/9, même si les bords ne rattrapent pas totalement le centre. Il n’est pas recommandé de fermer davantage, car au-delà de f/11, la perte de qualité liée à la diffraction commence à se faire sentir.
A mesure que l’on zoome, l’ouverture maximale se réduit mais les performances restent homogènes. Il est très agréable de voir ce zoom performer aussi bien dès sa pleine ouverture – même si celle-ci n’est pas très lumineuse. À 400 mm, les images capturées à l’ouverture maximale de f/8 sont déjà bonnes, et deviennent légèrement meilleures lorsque l’on ferme d’un diaph.
De façon générale, le fonctionnement du Canon RF 100-400 f/5.6-8 IS USM est très homogène et ne nécessite pas de privilégier une focale ou une ouverture particulière pour des raisons de piqué. Nous considérons f/9 comme le meilleur compromis et pouvons naviguer aisément sur l’intégralité de la plage focale à cette ouverture, n’ouvrant davantage que pour limiter la montée en ISO, lorsque la focale le permet.
Malgré de belles performances, nous nous devons de noter 2 défauts à cet objectif. En premier lieu, un manque général de micro-contraste. Ceci se matérialise par une restitution limitée des détails très fins et par un besoin de booster l’image au post-traitement pour lui donner plus de peps. Il sera aussi moins aisé d’opérer des découpes agressives pour redimensionner un cadrage comme fréquemment pratiqué avec des oiseaux en vol. Rien de ceci n’est rédhibitoire si l’on est précautionneux à la prise de vue.
Le second défaut n’est pas tant une limite de performance optique mais une conséquence de la faible luminosité générale. En photo d’action, il sera difficile de garder ses ISO à un niveau « raisonnable ». Et le bruit numérique ne vous laissera que rarement profiter du potentiel maximum de résolution que peut proposer cet objectif si les conditions d’éclairage ne sont pas idéales. Cela étant dit, reconnaissons aussi que la montée en ISO d’un Canon EOS R5 est assez spectaculaire, repoussant la limite de ce qu’on aurait autre fois considéré comme inutilisable.
Au chapitre des défauts optiques, le contrôle des aberrations chromatiques s’est avéré remarquable. Le vignetage est très faible et le flare est rarement inquiétant.
Ci-dessous un exemple avec et sans correction optique. Vous avez du mal à voir la différence? Nous aussi!
Le bokeh n’est pas le plus doux – avec un peu d’onion ring notamment – mais nous ne le qualifierons pas de moche pour autant.
Gardons à l’esprit que le Canon R5 dispose d’un capteur exigeant, qui met à mal bien des objectifs. Ainsi, nous considérons que la performance délivrée ici est remarquable, compte tenue du positionnement tarifaire de ce 100-400 mm.
Autofocus et réactivité
L’autofocus est probablement la principale force de cet objectif. Certainement aidé par la conception très légère des lentilles, le moteur nano-USM déplace l’ensemble de façon quasi-instantanée. Couplé à un Canon EOS R5 dont les algorithmes de détection sont nourris aux stéroïdes, voitures, oiseaux ou joggeurs sont très faciles à suivre. Il est difficile de retourner au moteur STM des autres objectifs de la marque lorsque l’on est habitué au fonctionnement de ce 100-400 mm.
Toutefois, la réalité d’une ouverture de f/8 est que tout ralentit en basse luminosité. Le capteur ne reçoit pas assez d’information pour travailler et l’objectif devient plus lent. Rassurez-vous, ce n’est pas véritablement dramatique, en témoigne le cliché de la lune dans la section précédente qui n’a nécessité aucun ajustement manuel.
Stabilisation optique
Ce nouveau télézoom dispose d’une stabilisation optique très efficace qui se révèle un bel atout pour compenser la faible ouverture sur des plans statiques. Canon annonce un gain maximal de 5,5 stops sur un boîtier non-stabilisé, et de 6 stops sur un hybride dont le capteur est stabilisé (IBIS).
Sur le terrain nous arrivons aisément à 3IL, soit 1/50 de secondes à 400 mm. Les vitesses encore plus basses ne seront accessibles qu’à ceux qui ne boivent pas (trop) de café.
Un point très appréciable : la stabilisation profite également au viseur pendant la composition, même sur un EOS R au capteur non-stabilisé. Observer le monde à 400 mm sans ce mécanisme pourrait vite donner la migraine, et nous sommes heureux que les fonctionnalités soient aussi riches pour un objectif dit « abordable ».
À qui s’adresse le Canon RF 100-400 mm f/5.6-8 IS USM ?
Avec son ouverture maximale limitée et son absence de tropicalisation, cet objectif cible bien davantage les photographes amateurs que les professionnels de l’image. Un parti-pris clairement assumé par Canon, la marque proposant déjà son objectif Canon RF 100-500 mm f/4,5-7,1 L IS USM, plus lumineux mais aussi beaucoup plus lourd et plus cher.
Le photographe qui va camper dans la nature des journées entières pour attendre que les animaux s’approchent de lui risquera des infiltration de poussière sur son capteur ou entre les lentilles sur le long terme. Le photographe de sport devra évoluer à 6400 ISO dès la fin d’après-midi et à 25600 ISO s’il est en intérieur.
Cet objectif s’adresse aux passionnés qui ont compris ses limitations et savent évoluer autour de celles-ci. Il devrait donc répondre aux besoins des photographes de voyages qui veulent une solution portable à utiliser en extérieur ou sur trépied, par exemple en complément d’un RF 24-105 mm f/4 L IS USM. Il pourra également satisfaire les parents qui veulent documenter les matchs de football de leurs enfants. N’oublions pas les randonneurs, qui veulent approcher les animaux lors de leurs expéditions. Monté sur un Canon EOS R7, il devient l’objectif sportif le plus abordable et le plus léger, toute plateforme confondue – avec en prime une portée encore plus grande, équivalent 160-640 mm.
Cet objectif attaque le marché sur 2 fronts. D’une part ceux qui ont toujours souhaité un téléobjectif sans oser sauter le pas à cause des tarifs. D’autre part, ceux qui valorisent la portabilité et l’aisance d’utilisation plus que la qualité d’image. Canon signe un sans-faute pour ces 2 catégories de photographes.
Alternatives au Canon RF 100-400mm f/5.6-8 IS USM
La monture RF n’étant toujours pas accessible aux constructeurs tiers, il faut se limiter au catalogue de Canon pour chercher des alternatives.
Il est naturel de penser immédiatement au Canon RF 100-500 mm f/4,5-7,1 L IS USM. Mais ils ne sont pas comparables selon nous. Cet objectif, dédié aux photographes professionnels, dispose d’une ouverture maximale plus grande sur toute la plage focale (entre 2/3 et 1 IL) et de la tropicalisation, nécessaire pour une pratique pro au quotidien. De plus, l’objectif offre une plus longue plage focale ainsi que l’excellence optique de la série L. Pour un pro, cela justifiera de s’acquitter d’un coût 4 fois plus élevé. Cet objectif d’excellence est disponible au tarif de 3099 €.
Pour d’autres, la seule différence de poids et de portabilité fait du Canon RF 100-400mm f/5,6-8 IS USM une solution beaucoup plus attractive, indépendamment des considérations tarifaires.
Il faut aller chercher dans le parc des objectifs EF pour trouver plus d’alternatives dont le Canon EF 100-400 mm f/4,5-5,6L IS II USM. Un objectif résolument haut de gamme et très similaire au RF 100-500 mm F4,5-7,1 L IS USM. Commercialisé à 2599 €, il est lui aussi destiné à un tout autre public.
Plus raisonnablement tarifés, on trouve les Tamron 100-400 mm f/4,5-6,3 Di VC USD et Sigma 100-400 mm f/5-6,3 DG OS HSM. Vendus respectivement 799 € et 849 €, ils sont tous les deux un peu plus lumineux… et considérablement plus lourds et encombrants – surtout avec l’ajout d’une bague d’adaptation EF/RF. La qualité d’image est équivalente et ils ont l’avantage d’afficher un peu moins de vignettage à ouvertures comparables.
Enfin, citons le Canon EF 70-300 mm f/4-5,6 IS II USM. Également très abordable à 679 €, il est à peine 100 grammes plus lourd, malgré une ouverture bien plus attractive et des performances optiques comparables. Ceux qui sont axés voyages préféreront avoir la plage 70-100 mm qui manque à notre objectif du jour, ceux qui sont plutôt tournés vers l’animalier souhaiterons davantage la plage 300-400 mm. À chacun ses priorités.
Conclusion
Vous l’aurez compris, nous sommes très agréablement surpris par ce zoom RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM signé Canon. Il y a deux choses à admettre tout de suite. La première est que l’ouverture maximale limitée impose quelques compromis sur les photos d’action qui ne se feront que de jour et en extérieur. La seconde est que l’arrière-plan ne disparaitra pas toujours totalement pour isoler son sujet. Si on adhère à ce concept, il n’y a aucune surprise, aucun vice caché.
Nous avons entamé ce test avec des inquiétudes liées à la faible luminosité de ce zoom. Au terme de ce test, nous sommes finalement ravis de constater combien les capteurs récents redéfinissent ce que l’on est en droit d’attendre d’une ouverture à f/8.
L’absence de tropicalisation est finalement notre seule frustration résiduelle. À ceci près, la proposition offerte ici est très attractive. À ceux qui limitent leur pratique en raison du poids de leur matériel et à ceux qui n’ont qu’un usage occasionnel des longues focales, le Canon RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM est un excellent compromis.
Le Canon RF 100-400 mm f/5,6-8 IS USM est disponible au tarif de 749 € chez Digit-Photo, Miss Numérique, IPLN, Camara, Digixo, Photo-Univers et à la Fnac.