Stephan Zirwes
© Stephan Zirwes, Pools 2018

Pools : les piscines vues d’en haut par Stephan Zirwes

Dans ses vues aériennes capturées en Allemagne et à travers l’Europe, Stephan Zirwes revisite l’aspect des piscines municipales devenues le motif central de ses compositions architecturales. C’est aussi un message autour de l’accessibilité de l’eau que souhaite faire passer le photographe allemand— en réaction à la profusion de piscines privées, aux États-Unis et en Afrique du Sud notamment et à sa privatisation pour des raisons commerciales.

Il en a fait l’objet de plusieurs séries dont Cut-Outs 2018 qui a remporté le 1er prix du Sony World Photographe Award (SWPA) en 2019 dans la catégorie professionnelle Architecture. Sa toute dernière série « Pools 2019 » vient de voir le jour.

Né en 1967 à Sindelfingen en Allemagne, Stephan Zirwes est spécialisé en photographie aérienne. Avant que la technologie du drone ne soit accessible, il n’hésitait pas à monter à bord d’un hélicoptère pour réaliser ses prises de vues. L’expérimentation du médium n’a pas de limites pour lui, qui travaille aussi bien l’image fixe qu’animée, réalise des installations vidéo et des vidéos aériennes artistiques.

Stephan Zirwes
© Stephan Zirwes, Pools 2018

Une nouvelle perspective des piscines municipales

Fasciné par ces espaces de vie communs où toutes les classes sociales se confondent, Stephan Zirwes débute ses « Pools » en 2016. Elles sont maintenant le sujet de 4 séries qui nous font redécouvrir les piscines municipales à travers une perspective inhabituelle. En surplomb, et en miniature, elles ressemblent à des agencements de formes graphiques, de lignes et de cercles, de couleurs, de motifs. Sur fond de message politique, Stephan Zirwes sublime les piscines municipales, à travers une perspective nouvelle qui met en lumière leur structure, leurs détails graphiques.

En 2016, dans sa toute première série, on distingue les baigneurs à la façon des wimmelbooks (livres pour enfants dont les images fourmillent de détails) qui sont l’une de ses influences. Le style plus minimaliste de Pools 2018 où tout élément extérieur est supprimé et remplacé par un fond à motif se concentre sur la forme et les couleurs des bassins. En post-production, des parties du carrelage d’origine sont copiées et élargies pour recréer un fond de motifs réguliers.

Stephan Zirwes
© Stephan Zirwes, Pools 2016
Stephan Zirwes
© Stephan Zirwes, Cut Outs – Pools 2018

Il se rapproche avec Cut Outs – Pools 2018, pour aller au plus près des détails : plongeoirs, lignes de démarcations, marches et rebords sont revisités et deviennent des éléments de ses agencements graphiques, des motifs abstraits replacés dans l’image.

La série, capturée à quelques mètres du sol seulement, remporte le 1er prix du Sony World Photography Award (SWPA) 2019 dans la catégorie Professionnelle en Architecture. Un tremplin, alors que le photographe poursuit en 2019 avec une toute nouvelle série, cette fois en pointant son objectif sur les piscines extérieures — rajoutant aux composition l’influence des saisons sur l’aspect des bassins que l’on découvre gelés, aux couleurs alternées par manque de traitements ou transportant des feuilles d’automne.

Si ses shootings ont débutés en Allemagne, et plus particulièrement dans le Sud où pratiquement chaque ville possède une piscine municipale, ils se déplacent ensuite à travers l’Europe et notamment en Islande.

Stephan Zirwes
© Stephan Zirwes, Pools 2019

L’expérimentation aérienne

Fasciné par les wimmelbooks d’Ali Mitgutsch lorsqu’il était enfant, par la profusion de détails et d’actions simultanées, Stephan Zirwes est plus tard influencé par les films des années 80, comme Koyaanisqatsi de Godfrey Reggio ou encore les films de Jacques Tati. « J’aime la beauté et l’humour, l’absurdité » explique-t-il. « J’aime découvrir de nouvelles perspectives, avoir des vues nouvelles sur les choses ». Ces expérimentations que souhaite développer le photographe concernent autant la composition que le matériel et les options techniques.

« Lorsque j’ai débuté, en 2000, avec ma première prise de vue en hélicoptère, je devais faire une vidéo aérienne sur un site de construction dans le cadre d’une mission. Mais j’avais terminé après seulement 20 minutes de vol alors que j’avais payé pour 1 heure. Alors nous sommes allés photographier les paysages environnants — et j’ai trouvé que la perspective était totalement inédite (à l’époque). J’adorais la vue des ombres, des arbres, des gens. »

© Stephan Zirwes, Pools 2016

« Plus tard, en 2011, j’ai commencé à fabriquer mes propres drones. Une période stimulante d’expérimentation. »

© Stephan Zirwes, Pools 2018
© Stephan Zirwes, Pools 2018

Côté matériel, Stephan Zirwes réalise ses prises de vue avec un moyen format Hasselblad de 60 Mpx en hélicoptère, et un Nikon D800E de 38 Mpx lorsqu’il photographie au drone « et à partir de la semaine prochaine, je vais shooter avec le nouveau Sony A7R IV de 60 Mpx » annonce t-il.

Le message au coeur du projet : préserver l’accessibilité de l’eau

Les piscines municipales — ces lieux de vie où toutes les strates de la population se mélangent – sont un souvenir d’enfance ancré chez le photographe, qui regrette la profusion de piscines privées dans d’autres pays, comme aux États-Unis, et dénonce la privatisation de l’eau, à une époque où cette question pose problème.

©Stephan Zirwes, Cut Outs – Pools 2018
©Stephan Zirwes, Pools 2019

« Les piscines privée font partie de mon enfance. Nous avons en Allemagne des piscines publiques immenses, avec 6 bassins et 15 000 visiteurs les jours les plus fréquentés. Et ça ne coûte pratiquement rien. Aux États-Unis presque toutes les piscines sont devenues des parcs aquatiques, les prix sont montés à 120 $ la journée. Finalement, les piscines sont un espace social qui ne devrait pas seulement être dédié au plaisir des personnes riches — mais accessible à tous. »

©Stephan Zirwes, Pools 2019

Décliner la représentation de ces espaces de vie — aux intérieurs aussi variés qu’imaginatifs dans leur conception qui en font un thème souvent exploré par la photographie — mais surtout continuer à expérimenter la prise de vue aérienne, c’est l’ambition du photographe. Il réalise également des « moving Stills » — des vidéos saisissantes en vues aériennes, tournées au cours d’un long plan fixe animé, tout comme des vidéos à 360 degrés, à retrouver sur son site et sur Youtube.

Pour découvrir les autres travaux de Stephan Zirwes, rendez-vous sur son site.