La directive européenne sur les chargeurs universels, entrée en vigueur le 28 décembre 2024, marque un tournant pour le marché des appareils photo. Cette nouvelle législation impose l’USB-C comme standard unique, visant à réduire les déchets électroniques et à simplifier l’expérience utilisateur.
Philippe de Cuetos, Directeur des affaires techniques et réglementaires à l’AFNUM, nous éclaire sur les implications de cette directive pour les fabricants et les consommateurs.
Sommaire
La fin du chargeur dans les boîtes : simplification ou casse-tête logistique ?
L’une des grandes nouveautés de cette directive est l’obligation pour les fabricants de proposer une version de leurs produits sans chargeur. « Ce que prévoit la directive, c’est qu’à la vente, les fabricants devront offrir une version sans chargeur. Ils peuvent toujours le proposer en option, mais il faudra deux emballages distincts : un avec, et un sans chargeur », explique Philippe de Cuetos.
Cette mesure devrait inciter les marques à retirer systématiquement les chargeurs pour simplifier leur logistique et réduire leurs coûts. Toutefois, le câble de recharge pourra encore être inclus, notamment pour des raisons techniques, comme la puissance ou la longueur du câble.
Quid des appareils photo sans USB-C ?
Cette nouvelle règle s’applique uniquement aux produits introduits sur le marché européen après le 28 décembre 2024. Les appareils déjà commercialisés avant cette date pourront continuer à être vendus, même s’ils ne respectent pas la norme USB-C. « Ce qui compte, c’est la date d’entrée sur le marché européen, pas la date de vente en magasin. Des produits mis en stock avant cette date pourront encore être vendus début 2025. »
Les produits ne respectant pas la norme USB-C sont donc amenées à disparaître progressivement à mesure que les stocks s’épuisent. Cela signifie bien la fin de la commercialisation de la majorité des appareils photo reflex en Europe.
On comprend d’ailleurs mieux la décision de certains fabricants de renouveler leur gamme de compacts ou bridges, comme c’est le cas chez Panasonic avec le TZ99 et le G97.
Un impact sur le marché du reconditionné
Un autre défi soulevé par cette directive concerne le marché des produits reconditionnés. Les appareils provenant de l’étranger, non commercialisés dans l’Union Européenne avant le 28 décembre 2024, devront obligatoirement être conformes à la norme USB-C.
« Si un appareil reconditionné vient d’un pays hors UE après la date limite, il sera considéré comme un produit neuf et devra être équipé d’un port USB-C. »
Cela pourrait limiter l’importation de produits reconditionnés depuis des marchés hors UE, comme l’explique Philippe de Cuetos : « Pour les appareils photo, comme pour les smartphones, les distributeurs et les reconditionneurs qui achètent à l’étranger devront s’assurer que les produits sont conformes à cette nouvelle réglementation. Sinon, ils ne pourront pas les vendre en Europe. »
En revanche, les produits reconditionnés au sein de l’Union Européenne ne seront pas impactés s’ils ont déjà été mis sur le marché avant la date limite. Au final, cela pourrait avoir un impact non négligeable sur le marché du reconditionné, notamment pour les smartphones, dont une grande partie provenait jusqu’alors de pays hors UE.
Enjeux environnementaux et économiques
Si cette directive vise à réduire les déchets électroniques, elle pourrait aussi engendrer des effets inattendus. Certains appareils, encore parfaitement fonctionnels mais non conformes à la norme USB-C, ne pourront plus être vendus en Europe et devront être écoulés sur d’autres marchés.
« Avec la valeur des appareils photo, il est peu probable qu’ils deviennent des déchets. Ils trouveront preneur sur d’autres marchés. »
Cependant, Philippe de Cuetos souligne une conséquence importante pour le consommateur européen : « le consommateur français et européen pourrait se retrouver avec moins de choix pour acheter des produits reconditionnés, ce qui risque d’augmenter sa facture s’il est obligé d’acheter du neuf. » Heureusement, le marché de l’occasion devrait continuer à se développer, avec notamment des acteurs majeurs comme MPB ou certains revendeurs français comme IPLN.
Une transition pour une recharge simplifiée
En conclusion, la directive européenne constitue une avancée majeure dans l’harmonisation des standards de recharge, en particulier pour les smartphones – avec Apple comme principal acteur concerné par cette nouvelle règle. En imposant l’USB-C, l’objectif est double : simplifier l’expérience des utilisateurs et réduire l’impact environnemental lié à la prolifération d’accessoires inutiles.
Cependant, cette transition n’est pas sans conséquence pour d’autres marchés, comme celui de la photographie. Elle entraînera une réduction de l’offre de boîtiers neufs ou reconditionnés plus anciens. Finalement, cette nouvelle législation ne risque-t-elle pas de se répercuter sur le consommateur, confronté à une offre moins diversifiée et potentiellement plus coûteuse ? Affaire à suivre.
A lire également : Interview Franck Mazellier, Photo Ciné Réparation : “rendre la réparation aussi simple que l’achat, c’est le défi d’aujourd’hui en photo”