Huit Visa d’or ont été attribués lors de la 36e édition du festival Visa pour l’Image à Perpignan. Une fois encore, l’engagement photographique et politique a été mis en avant, soulignant l’importance et l’urgence de cette édition. Face à la multiplication des terrains difficiles et à l’intensification des conflits, le travail des photojournalistes devient plus crucial que jamais. Tour d’horizon des photographies et des reportages récompensés.
Sommaire
- Visa d’or de la Presse Quotidienne Gökşin Sipahioğlu by Sipa Press
- Visa d’or Magazine
- Visa d’or News
- Visa d’or de la Ville de Perpignan Rémi Ochlik
- Visa d’or des Solidarités
- Visa d’or humanitaire du Comité International de la Croix-Rouge
- Visa d’or d’honneur du Figaro Magazine
- Autres prix et bourses à Visa pour l’Image
Visa d’or de la Presse Quotidienne Gökşin Sipahioğlu by Sipa Press
Depuis 1990, le Visa d’or de la Presse Quotidienne récompense les meilleures photographies publiées dans des quotidiens internationaux. Cette année, des journaux prestigieux tels que The Guardian, Libération, Le Monde, ainsi que des titres canadiens, néerlandais, espagnols et danois étaient en compétition. C’est finalement le légendaire quotidien américain The New York Times qui a remporté le prix, grâce au travail remarquable de leur envoyée spéciale, la photojournaliste palestinienne Samar Abu Elouf.
Samar Abu Elouf a photographié les semaines qui ont suivi le 7 octobre 2023, et a su dresser ainsi le portrait d’un quotidien sous les attaques et les bombes pour l’un des plus grands magazines internationaux. Ses images sont édifiantes, sinon terribles ; avec ce Visa d’or, le festival rend un hommage vibrant au travail de tous les photojournalistes présents à Gaza.
Visa d’or Magazine
Cette année, Katie Orlinsky remporte le Visa d’or Magazine pour sa série intitulée « Où sont passés les caribous », publiée dans National Geographic. Son reportage animalier met en lumière la diminution inquiétante des populations de caribous en Amérique du Nord, un phénomène dont les causes restent encore incertaines à ce jour.
Visa d’or News
Le Visa d’or News a été attribué à une photographie saisissante prise à Gaza pour l’AFP. Le photojournaliste Mahmud Hams a capturé un moment poignant où une Palestinienne blessée, entourée de ses enfants, arrive à l’hôpital Nasser, situé dans le sud de la bande de Gaza.
Il s’agit d’une des nombreuses victimes de frappes aériennes israéliennes du 13 novembre 2023 ; à l’heure où Israël fait face à une certaine pression internationale et minimise les répercussions de leurs attaques sur les populations civiles, récompenser un tel travail ne peut être qu’éminemment politique.
Visa d’or de la Ville de Perpignan Rémi Ochlik
Depuis 18 ans, des directeurs de la photographie de différents magazines internationaux désignent le lauréat du Visa d’or de la Ville de Perpignan Rémi Ochlik pour récompenser le photojournaliste qui, selon eux, a produit le meilleur reportage de l’année. Pour l’année 2024, c’est le travail de Loay Ayyoub à Gaza qui a obtenu ce Visa d’or.
Avec « La tragédie de Gaza », le photojournaliste palestinien a lui aussi témoigné des répercussions des attaques israéliennes sur les populations civiles de la bande de Gaza, avec des images au plus près des personnes concernées… des photographies qui se passent de commentaire.
Visa d’or des Solidarités
Le Visa d’or des Solidarités a été décerné au photographe français Pierre Faure, membre du studio Hans Lucas. Avec son projet intitulé « France périphérique », Pierre Faure a exploré les zones situées en marge des grandes villes, s’étendant jusqu’à la campagne, où de nombreux Français vivent à l’écart des centres urbains mondialisés.
Sa pratique du noir et blanc est au service de ces personnes la plupart du temps invisibilisées, sans pour autant se focaliser uniquement sur les difficultés ou sur les conditions de vie. Sans doute est-ce le temps long qu’il met en place dans ses reportages qui sert une photographie sensible et juste ; une photographie qui a su parler au jury du Visa d’or des Solidarités, c’est certain.
Visa d’or humanitaire du Comité International de la Croix-Rouge
Le Visa d’or humanitaire du CICR a été créé en 2011, et récompense chaque année un photojournaliste qui couvre un sujet lié à l’humanitaire et au conflit armé. Cette année, ce Visa d’or a été décerné à Hugh Kinsella Cunningham pour son reportage en République démocratique du Congo.
L’est du pays est le théâtre d’un conflit qui oppose le gouvernement et un groupe de rebelles nommé Mouvement du 23 mars (M23). Près d’un million de civils ont dû fuir et se réfugier ailleurs : les différentes forces militaires n’hésitent pas à faire usage d’armes lourdes qui atteignent également les populations civiles. Le reportage de Hugh Kinsella Cunningham, nourri de deux ans de terrain, offre un éclairage saisissant sur la situation critique qu’affronte cette région du Congo.
Visa d’or d’honneur du Figaro Magazine
Finissons avec un Visa d’or un peu particulier, puisqu’il récompense la carrière d’un photojournaliste confirmé et toujours en exercice. Cette année, c’est Paula Bronstein qui a été honorée. Avec ce prix, le festival rend hommage à près de trente ans de travail sur le terrain, marqué par un engagement indéfectible
Après vingt ans en Afghanistan, Paula Bronstein se concentre désormais sur l’Ukraine, avec toujours cette même constance dans le regard : ne jamais exploiter une situation critique, mais en exposer les causes et les conséquences par la photographie, grâce à la photographie. Une belle récompense pour une photojournaliste d’une grande pertinence politique.
Autres prix et bourses à Visa pour l’Image
Lors de cette édition du Visa pour l’Image, plusieurs prix ont mis en lumière des projets remarquables à travers le monde. Le Visa d’or de l’information numérique franceinfo a été attribué à Amaury Hauchard et Michele Cattani pour leur reportage “Sahara, la soif de l’or”, diffusé sur LesJours.fr, offrant un regard percutant sur l’exploitation aurifère dans le désert.
Le prix ANI-PixTrakk (5 000 €) a récompensé Marin Driguez (France) pour son reportage “Prendre soin”, qui documente la situation des hôpitaux publics en Belgique, un travail qui met en lumière les défis quotidiens du personnel médical.
Parmi les contributions aux projets, Cynthia Boll (États-Unis) a obtenu la bourse Canon de la Femme Photojournaliste pour continuer son enquête sur les impacts sociaux de la délocalisation de la capitale indonésienne de Jakarta à Nusantara. Alan Lau, lauréat de la bourse Canon du documentaire vidéo court-métrage, financera son projet “The Gordian Knot”, un documentaire sur l’abattage de buffles au Népal.
José Nicolas (France) a reçu la bourse Saif / Benoît Schaeffer pour l’édition photographique, dotée de 10 000 €, pour publier une monographie aux éditions Revelatoer. Quant à la bourse de la nouvelle photographie urbaine, soutenue par Google, elle a été décernée à Lilas Lehanneur (France), un talent émergent de la scène photographique.
Le prix Pierre et Alexandra Boulat est revenu à Gaëlle Girbes (France) pour son projet “Ukraine, survivre au milieu des ruines”, tandis que le prix Camille Lepage a été attribué à Virginie Nguyen Hoang (Belgique), lui permettant de poursuivre son travail sur l’impact de la guerre en Ukraine, publié dans Collectif Huma.
Le prix Photo – Fondation Yves Rocher a salué le projet d’Axelle de Russé (France), qui documente la Terre de Feu en Patagonie chilienne. Kiana Hayeri (Canada) et Mélissa Cornet (France) ont, quant à elles, remporté le prix Carmignac du photojournalisme pour leur reportage sur les conditions des femmes afghanes sous le régime des talibans.
Enfin, le prix Françoise Demulder a été attribué à deux photographes, Sandra Calligaro (France) pour ses travaux sur l’Afghanistan, et Catalina Martin-Chico (franco-espagnole) pour son reportage sur les ex-combattantes FARC en Colombie, mettant en lumière la complexité de la réinsertion de ces femmes dans la société.