Le jury du concours World Press Photo vient de dévoiler les 4 grands lauréats de son édition 2024. Sélectionnées parmi les quelque 61 000 clichés en compétition, les photographies primées illustrent l’impact des guerres sur les civils, les questions migratoires ainsi que des faits de société souvent laissés dans l’ombre. Retour sur les quatre prix du World Press Photo 2024.
Prix World Press Photo de l’année
Le premier prix du World Press Photo récompense la photographie déchirante de Mohammed Salem : « Une Palestinienne serre dans ses bras le corps de sa nièce ». Membre de l’agence Reuters, Mohammed Salem avait déjà été récompensé en 2010 pour une photographie sur le même terrain, une image de bombardements au phosphore blanc sur la bande de Gaza.
Prise le 17 octobre 2023, elle montre Inas Abu Maamar serrant le corps de sa nièce, Saly, tuée par un missile à Khan Younès, au sud de la bande de Gaza. Le photographe se trouvait alors à l’hôpital Nasser, et a vu dans cette scène l’incarnation du conflit en train de reprendre de plus belle.
Sans doute, l’image frappante de Mohammed Salem rappelle à nouveau la nécessité d’un cessez-le-feu immédiat, dans un conflit qui touche grandement des civils, des femmes et des enfants. La composition, tout à fait picturale, soignée et respectueuse, montre ce qu’est la perte et ce qu’elle provoque. Un sentiment universel auquel tout le monde peut s’identifier : voilà la force de cette photographie.
Prix World Press Photo “Série de l’année”
En tournage pour le magazine GEO, Lee-Ann Olwage est allée à la rencontre d’une famille malgache vivant avec un parent âgé qui souffre de démence. Cette série s’inscrit dans un pays où le sujet est tabou, ce qui a pour conséquence la stigmatisation des personnes qui perdent la mémoire ou qui présentent des symptômes associés à la folie.
C’est aussi de famille dont il s’agit à travers cette série de Lee-Ann Olwage, et du soin qu’on peut s’apporter les uns aux autres en son sein ; sans pour autant nier les incuries sociétales à ce sujet. Sur la première photographie de la série, « Dada Pau » et sa petite-fille se préparent pour aller à l’église. Ce dernier, atteint de démence depuis plus de dix ans, est aidé par sa fille.
Prix World Press Photo “Projet à long terme”
Cette année, le prix « Projet à long terme » a distingué le travail de Alejandro Cegerra sur les migrants qui tentent de passer la frontière entre le Mexique et les États-Unis. Lui-même a pu expérimenter une situation similaire, lorsqu’il est parti de son Venezuela natal en 2017, et c’est en partant de son vécu et de sa connaissance intime du sujet qu’il a dépeint les conséquences des politiques migratoires récentes au Mexique.
Intégralement en noir et blanc, « Les Deux Murs » se focalise sur « l’action et la résilience des migrants », selon le jury du World Press Photo. Alejandro Cegerra a commencé cette série en 2018 : c’est ainsi qu’il a pu voir l’évolution de la question migratoire et de ses crispations suite à l’ère Trump.
Prix World Press Photo “Format libre”
Enfin, mentionnons le travail de Julia Kochetova : « La guerre est personnelle ». Alors qu’aucun signe de paix ne semble pointer sur le conflit en Ukraine, la photographe a créé un site Internet qui rassemble photojournalisme et documents personnels pour donner un aperçu de la réalité du quotidien.
C’est ainsi qu’elle pose la question des répercussions concrètes et intimes qu’une guerre peut avoir sur les personnes qui la vivent au jour le jour, avec ce corpus de photographies, de poésies ou de musiques. C’est sans surprise qu’elle a été récompensée du prix Format libre, tant son projet 2.0 tout en découpage fait preuve d’originalité malgré la dureté du sujet.
L’exposition World Press Photo 2024 parcourra plus de soixante villes autour du monde, en commençant par Amsterdam et son église Nieuwe Kerk, jusqu’au 14 juillet. Tous les détails à propos de cette 69e édition du concours sont à retrouver sur son site Internet.