Connu outre-Atlantique pour ses clichés emblématiques de l’Amérique des années 60, Henri Dauman a su capturer l’essence d’une époque à travers son objectif. Pourtant, son œuvre était largement restée dans l’ombre en France. L’exposition Henri Dauman : The Manhattan Darkroom, organisée par le Musée de la photographie Charles Nègre de Nice, permet de redécouvrir son œuvre et son impact indélébile sur la photographie.

L’avènement de l’Amérique moderne
Né en 1933 au cœur de Montmartre, le destin d’Henri Dauman est d’abord marqué au fer blanc des souffrances de son époque. Son père meurt prisonnier du camp de concentration d’Auschwitz alors que sa mère succombe à un empoisonnement. Orphelin, le jeune homme émigre aux États-Unis en 1950, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.
Force de vie et de résilience, il construit dans sa nouvelle patrie une carrière exceptionnelle. D’abord correspondant aux États-Unis pour la presse française et étrangère, Henri Dauman noue des relations de travail durable avec de prestigieuses publications locales (Life, The New York Times, Newsweek…).
Si ses images sont d’abord celles de l’étonnement devant la majesté et la beauté architecturale de New York, ses clichés ont rapidement acquis une force narrative, enracinée dans sa fine compréhension du contexte sociopolitique de son époque.

En 1963, il couvre les funérailles de JFK. En 1977, sa série The Savage Nomads Gang met en exergue la rupture d’une jeunesse décidée à inventer ses propres codes.

Son héritage photographique rassemble ses portraits de figures artistiques et historiques comme les moments charnières de l’époque moderne qu’il a su saisir. Dans ses portraits d’Andy Warhol se lit la transformation de l’Art et de la communication, l’avènement du marketing et du quart d’heure de gloire auquel chacun voudra désormais prétendre.

Dans les prises de vue effectuées dans les rues new-yorkaises durant les années 60 s’affirment les revendications des minorités ethniques et le combat pour les droits civiques de la communauté afro-américaine comme les protestations lors de la crise cubaine.

Henri Dauman : dernier arrêt sur images
« L’homme qui photographiait l’Amérique », comme on le surnommait, est à l’honneur au Musée Charles Nègre. La rétrospective niçoise, dernière collaboration menée du vivant de l’artiste, présente une sélection minutieuse de 170 œuvres, invitant les visiteurs à découvrir ou redécouvrir le regard unique porté par le photographe sur des événements et des personnalités qui ont marqué son temps.

Précédemment présentée au Palais d’Iéna à Paris et au Musée Nicéphore Niepce de Chalon-sur-Saône en 2104, l’exposition prend une bien méritée place au soleil sur la Côte d’Azur.
Des portraits intimes de célébrités (Jane Fonda, Jean Seberg, Marylin Monroe, Jean-Luc Godard, Miles Davis, Elvis Presley…) aux instantanés de la vie quotidienne américaine, chaque photographie couleur ou noir et blanc témoigne de son talent et de sa sensibilité esthétique.

Inspiré par le cinéma américain comme par la créativité des magazines, le photographe construit son style, entre spontanéité et narration léchée comme lorsqu’il saisit le match de boxe opposant I. Johanson à F. Patterson à travers les expressions faciales d’Elisabeth Taylor.
L’exposition The Manhattan Darkroom met en lumière son approche unique, soulignant l’importance de son travail dans l’histoire de la photographie. Les visiteurs sont conviés à un voyage dans le temps, explorant la manière unique dont il a su immortaliser l’essence de moments éphémères et l’âme de son époque.

Malgré sa disparition le 13 septembre 2023, son œuvre continue de vivre et d’inspirer ses spectateurs. Henri Dauman laisse derrière lui un fonds photographique riche et diversifié, une mémoire visuelle de l’Amérique moderne construite au fil de son avènement. L’exposition à découvrir au Musée de la photographie de Nice jusqu’au 26 mai 2024 est un hommage mérité à sa vision artistique et à son impact durable sur la photographie.
Informations pratiques :
Henri Dauman, The Manhattan Darkroom
Musée Charles Nègres
Du 17 février au 26 mai 2024
1, Place Pierre Gautier, 06300 Nice
Du mardi au samedi, de 10 h à 18 h
Tarif : 5 €