Les éditions Textuel publient Espace vital : femmes photographes iraniennes, sous la direction d’Anahita Ghabaian Etehadieh. Un ouvrage à la portée considérable, tant il exprime la force et le courage des revendications des Iraniennes. Rassemblant les clichés de 23 femmes photographes, il offre un véritable témoignage des voix féminines de la photographie iranienne contemporaine.
Photographier une société en crise
Le 16 septembre 2022, Mahsa Amini, jeune kurde iranienne, meurt après plusieurs jours de garde à vue. Elle avait été arrêtée par la police des mœurs pour « tenue inappropriée ». Cette mort douteuse, dont les autorités se défendent, engendre des soulèvements de la population pendant plusieurs semaines. Ces révoltes sont alimentées notamment par les sphères artistiques iraniennes, qui ne manquent pas de s’exprimer sur les évènements.
Dans ce contexte, le livre « Espace vital : femmes photographes iraniennes » paru aux Éditions Textuel, sous le commissariat de Anahita Ghabaian Etehadieh, rassemble les travaux de 23 femmes photographes iraniennes, qui tentent de s’exprimer au-delà des frontières, depuis un pays où leurs voix sont régulièrement réduites au silence, et leurs productions censurées. Les travaux de ces femmes photographes issues de trois générations adressent une critique souvent métaphorique de société iranienne actuelle et du pouvoir en place.
Des contrastes en image
En feuilletant l’ouvrage, on découvre des photographies colorées, ironiques, de femmes seules ou entourées de leurs familles, comme ceux de Shadi Ghadiriande ou Newsha Tavakolian, mais aussi des clichés plus dramatiques, aux allures sombres et austères comme ceux de Atoosa Alebouyeh. Certaines photographies apparaissent presque documentaires, d’autres plus posées, à la croisée de l’art contemporain.
Mais on trouve aussi dans l’ouvrage des photographies de paysages comme celles de Solmaz Daryani dans sa série « Les Yeux de la Terre », qui montre le lac d’Ourmia, presque asséché par le réchauffement climatique et délaissé par le tourisme.
L’ouvrage ouvre ainsi une fenêtre sur toute la diversité et la vitalité de la photographie iranienne. Et l’on y découvre une vision féminine et féministe sur le quotidien de la population. On explore l’Iran, pays dont l’histoire a souvent été mêlée aux intérêts des grandes puissances occidentales, à travers les yeux de celles qui ont souvent subis les conséquences de conflits et des stratégies politiques.
Soutenir les sphères artistiques féministes et engagées
Anahita Ghabaian Etehadieh, née en 1962 à Téhéran, vit et travaille en Iran où elle accueille régulièrement des expositions dans ses deux galeries dont une dédiée à la photographie, la Silk Road Gallery, qu’elle a fondé en 2001.
Pour cet ouvrage, elle a reçu le soutien du Ministère de la Culture, de la Fondation Antoine de Galbert, de la Soudavar Memorial Foundation et d’Olivier Legrain, créateur du fonds de dotation Riace France pour les migrants.
Selon Anahita Ghabaian Etehadieh, la photographie est pour ces femmes et artistes iraniennes un espace vital pour s’exprimer. Leur expression artistique permet d’informer le monde des bouleversements actuels dans la société iranienne, et des voix révolutionnaires qui en émergent, mais aussi de les libérer du poids du silence.
Au carrefour entre photographie, arts visuels et sciences humaines, les Éditions Textuel, fondées en 1995 par Marianne Théry et Luce Pénot et associées à Actes Sud depuis 2008, livrent un ouvrage où l’art est intime et politique.
Espace vital : femmes photographes iraniennes, Anahita Ghabaian Etehadieh
Éditeur : Éditions Textuel
45 €, 160 pages, format relié, 23 x 31 cm.
Acheter le livre : Fnac ; Fondation Antoine de Galbert