Samy Berkani est photographe et nous propose de découvrir les villes d’Iran, à la poursuite de figures fantomatiques, dans sa nouvelle série « Black Ghosts ». L’artiste insiste sur la dimension fictive de son travail, qui ne reflète en aucun cas la réalité de la place de la femme dans les rues bouillonnantes iraniennes, empreintes de sociabilité, de mixité et de diversité.
« Mon souhait n’était pas de faire un reportage sur les femmes en Iran, et cette série n’est absolument pas représentative des iraniennes. Mais l’image de cette forme noire dans les rues de Chiraz m’a artistiquement attiré. Elle n’a pas fait appel à ma conscience politique mais à mon imaginaire. Une démarche un peu égoïste, mais je crois bien qu’on ne choisit pas tout en photographie. Parfois les sujets vous choisissent et vous suivez aveuglément. »
L’imaginaire du fantôme qui se déplace furtivement avant de disparaître aux premières lueurs du soleil, c’est cette rencontre singulière que Samy Berkani a faite en découvrant de jour les rues de Chiraz. Fasciné par cette figure voilée de noir, il a suivi ces femmes à travers les ruelles et les monuments de la civilisation iranienne pour réaliser ses clichés.
« C’est ce qui me plaisait vraiment, de suivre une masse noire dans un environnement époustouflant. »
Alors que les photos nous donnent l’impression d’un moment privilégié et de lieux uniques, c’est le photographe qui a fait le choix d’isoler ses protagonistes pour donner un caractère intemporel à sa photographie et se concentrer sur un travail fictif et graphique. Ceci s’accorde avec sa technique, déjà présente dans sa série Light and Faces : l’utilisation d’un Nikon Df et d’un objectif 85mm f/1.4 AF-S qui lui permettent de rester à l’extérieur des scènes et de se focaliser sur un élément précis de son champ, écartant ainsi les dimensions urbaine et sociale qui animent l’environnement de ces femmes pour en faire des fantômes.
Cette série nous propose un seul visage, un regard qui a bouleversé le photographe. La plupart des femmes ne se savaient pas photographiées mais celles qui s’en sont aperçues ont défié l’objectif – à l’encontre de tous les aprioris autour de la femme iranienne et voilée, elles ont soutenu le regard – nous confirmant ainsi que même drapés de noir, les fantômes n’existent pas.
Vous pouvez retrouver l’ensemble de la série “Black Ghosts” sur le site de Samy Berkani.