L’abandon des lieux : Claire Davadie explore son histoire familiale dans un livre

Les éditions Images Plurielles ajoutent un ouvrage à leur Nouvelle Collection Librement avec une première publication pour Claire Davadie : L’abandon des lieux. Constitué d’archives transmises par ses parents, de cartes et de photographies contemporaines de l’Algérie, le livre enchaîne différents types d’images. Elles se font face, s’accompagnent et se répondent pour former un récit très personnel : celui d’une histoire familiale marquée par l’absence d’un travail de mémoire.

« Dans mon récit familial, il m’a toujours manqué des zones. » Sans doute que beaucoup de déracinés pourraient prononcer cette phrase où le mot zone prend un double sens. L’abandon des lieux porte bien son nom ; du départ de l’Algérie vers la France, c’est une zone géographique qu’on quitte et, au fil des ans, ces zones si fragiles de la mémoire. Pour Claire Davadie, l’histoire est à reconstituer, c’est comme une injonction, et ce malgré tous les manques à combler et l’absence de témoins de plus en plus marquante.

Alors il y a les images d’archives, celles des fonds de tiroirs avec son lot de portraits aux couleurs délavées et aux noms oubliés. Les photos de famille ont traversé la Méditerranée avec eux, ses aïeux, peut-être un moyen pour Claire Davadie de reconstituer sa généalogie. Elle imagine, fantasme ce pays de l’autre côté de la mer, aidée de son grand-père qui dessine les cartes, comme des cartes mémorielles reproduites fidèlement dans l’ouvrage et qui éclairent le reste des images.

© Claire Davadie

Lassée d’imaginer, ou plutôt lassée de se cantonner à cette nécessité de l’imaginaire, la photographe a entrepris quelques voyages vers l’Algérie de ses ancêtres. Pas de date, pas de lieu – toute comme les images d’archive inclues dans l’ouvrage –, les photographies donnent à voir des visages, des gros plans de détails, des traces capturées sur son passage. Souvent auréolés d’un léger voile noir, les clichés semblent d’un coup devenir images d’archive, à leur tour.

© Claire Davadie

Vers la fin de L’abandon des lieux, un autoportrait se dessine, un reflet dans une vitre qui donne sur un appartement sans qu’on puisse distinguer s’il est habité, ou en travaux, l’image d’un lieu abandonné. Un autoportrait de l’extérieur vers l’intérieur, où le visage est barré par l’embrasure éclairée d’une porte, à l’instar de ces documents officiels ou certaines phrases sont biffées au marqueur indélébile. C’est certain : la pratique photographique de Claire Davadie éclaire, donne de la lumière dans l’obscurité de l’héritage familial.  

L’abandon des lieux, de Claire Davadie
Éditeur : Images Plurielles
20 euros, 64 pages, 45 reproductions en couleur noir et blanc, format broché, 17 x 24 cm.
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