Après la victoire de la France sur la Croatie lors de la finale de la Coupe du Monde 2018 les sarcellois-e-s sortent dans la rue. Dans cette ambiance des voitures circulent et claxonnent en plein coeur du Grand Ensemble.

Camilo Leon-Quijano : la cité, une anthropologie photographique

Comment penser la cité, le lien étroit entre les habitants et l’environnement urbain qui les entoure ? Entre 2015 et 2018, le photographe et anthropologue franco-colombien Camilo Leon-Quijano, docteur de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, a mené un remarquable travail d’immersion à Sarcelles. Ses photographies monochromes font actuellement l’objet d’une exposition à la Maison de l’Architecture et de la Ville PACA, à Marseille, à découvrir jusqu’au 16 décembre 2022.

Maryse – Grand Ensemble, Sarcelles 2017 © Camilo Leon-Quijano

Depuis 2003, le festival Image de Ville s’empare des différents territoires de la Métropole Aix-Marseille-Provence, pour célébrer les créations cinématographiques portant sur l’architecture et l’espace urbain. Le festival fait dialoguer le cinéma avec les études urbaines et les métiers de la fabrique de la ville.

Dans le cadre du festival, la Maison de l’Architecture et de la Ville (MAV) PACA accueille l’exposition « La Cité : une anthropologie photographique » de Camilo Leon-Quijano. Docteur à l’EHESS, le chercheur s’interroge sur les liens entre photographie et ethnographie visuelle dans différents contextes urbains. S’inscrivant dans cette perspective, l’exposition présentée à la MAV rend compte d’un long travail de recherche et d’anthropologie photographique, mené entre 2015 et 2018 au sein des Grands ensembles de Sarcelles, en Ile-de-France. 

Driver marche avec ses amis sur le Forum des Cholettes. Ancien haut lieu de la culture à Sarcelles. Amianté depuis des années, il a été vendu par la Mairie à Bouygues Immobilier pour la construction de nouveaux logements. Collectif Made in Sarcelles  – Grand Ensemble, Sarcelles 2016. ©Camilo Leon-Quijano

Camilo Leon-Quijano : une immersion à Sarcelles

Ville nouvelle à la projection futuriste, Sarcelle devient très vite l’incarnation de la « banlieue » ou « périphérie » parisienne, associée le plus souvent dans les médias à une imagerie négative et anxiogène. En partant de ce constat, Camillo Leon-Quijano renseigne et analyse la construction sociale de ces fantasmes autour des ou de la banlieue.

Les Flanades – Grand Ensemble, Sarcelles 2018 © Camilo Leon-Quijano

Pour cela, il a développé une démarche sensible et participative s’appuyant sur une présence quotidienne et immersive, entre 2015 et 2018, dans les espaces domestiques et collectifs des grands ensembles de Sarcelles.

Aux côtés de Jeff Silva, et en partenariat avec la Wenner-Dren Foundation, le photographe rend compte de cette expérience anthropologique avec une exposition où l’on est plongé dans les voix, les sons, les espaces et les visages de Sarcelles.  

Entre les murs des Grands ensembles

L’exposition s’organise en cinq temps, répartis sur plusieurs panneaux aux couleurs vives, dont certains présentent en toile de fond le tissu urbain sarcellois. On commence par un panneau sur l’imagerie et les fantasmes qui ont défini la ville nouvelle de Sarcelles et ses habitants et habitantes depuis sa création.

On y déconstruit les liens entre les espaces urbains périphériques et les discours autour d’une présumée « maladie sociale » dont ils feraient l’objet.  En continuant le parcours, on arrive devant un panneau dédié à l’engagement citoyen à Sarcelles, donnant à voir plusieurs initiatives habitantes ayant croisé le chemin du chercheur.

Terrain de foot près du Collège Chantereine – Sarcelles 2017 © Camilo Leon-Quijano

On peut ensuite monter dans la mezzanine de la MAV pour regarder et écouter l’équipe de Rugby Woman de Sarcelles. Cette pause vidéo nous amène au quatrième panneau, dédié au sport, qui rend compte de l’importance de celui-ci dans ce territoire, mais aussi de l’engagement du photographe sur le terrain, puisqu’il a fait partie d’un club de boxe sur place pendant le temps de sa recherche.

Enfin, on termine l’exposition avec le cinquième panneau, rendant compte d’une expérience plus intime entre les murs des grands ensembles.  Imprégnés du quotidien des sarcellois, on entre dans leurs espaces domestiques par l’image et les sons. On croise alors la trajectoire de Maryse, chez qui l’anthropologue a vécu pendant un temps.

Photographie de l’exposition organisée par la MAV/CROA PACA © Camilo Leon-Quijano

Ainsi, l’exposition de Camilo Leon-Quijano amène le visiteur à repenser les représentations et les discours autour de la « Cité », en mélant textes, archives, photographies, et sons. Cette immersion sensible prend un sens particulier dans un lieu rassemblant au quotidien les métiers de l’architecture et de la fabrique de la ville. La MAV est en effet un lieu qui vit, traversé et utilisé par des personnes qui pensent et font la ville, et qui participent à redéfinir par leurs pratiques professionnelles les catégories socialement construites, telles que « la banlieue », « la cité » ou « la périphérie ».

Informations pratiques :
« La Cité : une anthropologie photographique »
Du 11 octobre au 16 décembre 2022
MAV / Ordre des architectes PACA
12 Bd Théodore Thurner, 13006 Marseille
Du lundi au vendredi, de 9h à 13h et de 14h à 17h,
Entrée libre

Le travail de Camilo Leon-Quijano est à retrouver sur son site Internet.