Visa pour l'Image 2022
Dans un orphelinat, un adolescent tire les rideaux après avoir regardé la paysage par la fenêtre. Dans la périphérie de Lviv, Ukraine, 23 mars 2022 © Lucas Barioulet pour Le Monde

Ouverture de la 34ème édition de Visa pour l’Image : tous les temps forts du festival

À partir du samedi 27 août, la ville de Perpignan accueille la 34e édition du festival Visa pour l’Image. Une édition encore une fois marquée par l’importance de plus en plus capitale des photojournalistes sur les zones de conflit, et dans les pays autoritaires où la liberté de la presse est de plus en plus contrainte, réduite, bafouée. Tour d’horizon des temps forts de cette 34e édition.

34e édition de Visa pour l’Image : un contexte géopolitique particulièrement chargé

Si le festival met à l’honneur la nécessité du travail des photojournalistes, il permet également de découvrir, en grand format, de nombreux tirages de photographies aperçues çà et là dans un journal ou un magazine. L’occasion de redécouvrir l’Image en dehors de son actualité, avec le recul que le photojournalisme de la presse quotidienne et de l’immédiat ne permet pas.

Visa pour l'Image 2022
Quelques jours après l’explosion au port de Beyrouth, des manifestants en colère sont descendus dans la rue, presque un an après le début de la « révolution » du 17 octobre 2019 © Tamara Saade

L’occasion, aussi, de retracer une année forte en actualité : la sortie de la crise sanitaire, le conflit ukrainien, la situation en Afghanistan… les terrains d’actualité sont nombreux, mais le festival est attaché à ne pas en privilégier un plutôt qu’un autre, à ne pas hiérarchiser les causes.

Crise migratoire au nord de la France

Après la Méditerranée, la Manche est devenue l’un des enjeux de la crise migratoire. Les traversées se multiplient, et les naufrages ne sont pas moins nombreux dans la mer du sud.

Avec « Les routes la mort », le photojournaliste Sameer Al-Doumy éclaircit les zones d’ombres de cette situation : système des passeurs, la sécurisation de plus en plus renforcée de l’Eurotunnel, les politiques migratoires sécuritaires et les conséquences qu’elles entraineraient sur la précarisation des trajets. Son travail a débuté juste après la première vague du virus, en août 2020, pour s’achever en mai 2022.

Visa pour l'Image 2022
Un migrant sous sa tente dans un camp de fortune en périphérie de Calais © Sameer Al-Doumy / AFP

L’écologie et l’environnement à bras le corps

Pêche industrielle, effets du changement climatique et de la surexploitation des ressources sur la biodiversité, disparition d’espèces vivantes… l’écologie et la préservation de l’environnement sont devenues un sujet pour quasiment tous les politiques et les organisations gouvernementales et non gouvernementales, avec des positionnements divers et variés.

C’est pourquoi le festival a choisi de consacrer deux expositions à cette question : « La Sixième Extinction » d’Alain Ernoult, et « Pêches mondiales » de George Steinmetz. Ce dernier a travaillé pendant six ans, sur de gros chalutiers qui appartiennent à de grands groupes commerciaux comme sur des bateaux de pêche de petits producteurs.

Visa pour l'Image 2022
Nouadhibou, Mauritanie. Des têtes de petits requins sèchent à Nouadhibou © George Steinmetz

Alain Ernoult vient encore plus près des espèces menacées. Il les photographie de près, les humanise pour mieux montrer les similitudes entre les différents êtres vivants – notamment l’iguane et son anthropomorphisme troublant. On pourrait rapprocher sa démarche à celle du travail de Sebastião Salgado, avec cette volonté d’aller au plus près du vivant, ses contrastes forts et l’usage quasi exclusif du noir et blanc.

Visa pour l'Image 2022
Iguane des Petites Antilles (Iguana delicatissima), île de la Grenade, Caraïbes. Espèce vulnérable (UICN) © Alain Ernoult

Ukraine : la guerre au quotidien

Le 24 février 2022, Vladimir Poutine annonce le lancement de son opération militaire contre l’Ukraine. Loin des images spectaculaires de missiles et de destruction, Lucas Barioulet, en reportage pour le journal Le Monde, s’attache à témoigner des retentissements individuels de millions de personnes dont la vie a basculé du jour au lendemain. Des portraits d’autant plus nécessaires, afin de témoigner d’une réalité constamment niée côté russe. Face à l’impudence, l’image et sa véracité comme seuls remèdes.

Dans un orphelinat, un adolescent tire les rideaux après avoir regardé la paysage par la fenêtre. Dans la périphérie de Lviv, Ukraine, 23 mars 2022 © Lucas Barioulet pour Le Monde

À Marioupol, Mstyslav Chernov et Evgeniy Maloletka d’Associated Press sont restés pendant plus de quinze jours. Ils ont été les seuls journalistes indépendants à être présents dans cette ville devenue rapidement un symbole de la résistance ukrainienne. Les images de ce duo ont dépassé l’usage journalistique : une de leur photographie a été utilisée par l’ambassade de Russie, barrée du mot FAKE, une autre a été brandie par un diplomate au conseil de sécurité de l’ONU en affirmant qu’elles avaient été falsifiées. Finalement, traqués par le Kremlin, les photojournalistes ont été contraints de quitter la ville.

Après le bombardement d’une zone résidentielle, un militaire ukrainien prend une église en photo, Marioupol, Ukraine, 10 mars 2022. © Evgeniy Maloletka / Associated Press

Correspondant au New York Times, Daniel Berehulak s’est rendu en Ukraine après la retraite de l’armée russe. Il y a attesté la découverte par les combattants ukrainiens des crimes de guerre perpétrés durant des semaines d’occupation. « Des gens vivent ici », voici la phrase qui avait été inscrite sur les façades des habitations pour signaler que les occupants étaient des civils, et qui a donné son nom à l’exposition de cette édition de Visa pour l’Image

Iryna Abramova (48 ans) dans les ruines de la maison où elle et son mari Oleh vivaient depuis vingt ans. © Daniel Berehulak

Visa pour l’Image : mettre en lumière l’invisible

Visa pour l’Image sera aussi l’occasion de retrouver nombreux et éclectiques travaux des photojournalistes exposés : Ana María et Arévalo Gosen sur la condition des femmes en Amérique latine, Maéva Bardy sur la douzième expédition scientifique de la goélette Tara, Valerio Bispuri sur les hôpitaux psychiatriques en Afrique

De même, le Festival met à l’honneur les travaux Acacia Tour d’horizon des temps forts de cette 34e édition. sur les pilotes d’avion dans les plaines glacières de l’Alaska, de Selene Magnolia sur le plus grand ghetto gitan d’Europe, de Siegfrief Modola au cœur de la rébellion birmane – et plein d’autres encore. La programmation complète est à retrouver sur le site du festival.

Femmes, hommes et enfants vivent tous ensemble. Centre d’accueil psychiatrique d’Avrankou, Bénin, 2021 © Valerio Bispuri

Le festival Visa pour l’Image se déroule du samedi 27 août au dimanche 11 septembre inclus, ouvert tous les jours de 10h à 20h. Les expositions sont également à retrouver en ligne sur le site Internet du Festival jusqu’au 30 septembre 2022.