Visite de l’exposition « Couleurs pays » au festival des Photaumnales 2017

Pour sa 14ème édition, que nous vous avions déjà présentée dans un article précédent, le festival des Photaumnales 2017, organisé par Diaphane – pôle photographique en Picardie, a célébré son ouverture au monde. Avec sa thématique « Couleurs pays », l’association vous embarque pour les Caraïbes, découvrir la culture, les habitants et les paysages de la Guadeloupe et de la Martinique, tout en faisant un saut également au Québec et au Canada, ou encore à Hong-Kong.

Ce week-end, Phototrend a assisté à l’inauguration du festival au Quadrilatère de Beauvais et à l’espace culturel Séraphine Louis de Clermont de l’Oise, et vous livre son retour.

Diaphane et les Photaumnales : échange à l’international et dynamisme régional

Cette volonté de s’ouvrir à l’international, « d’échanger sur les différentes cultures, le métissage, les relations entre pays et métropoles, de se montrer citoyen du monde » comme le souligne son co-directeur, Fred Boucher, n’est pas une nouveauté pour Diaphane. Créée en 1991, l’association s’est appuyée depuis longtemps sur des partenariats internationaux, notamment en Gaspésie au Canada et à Hong-Kong. De nombreuses résidences d’artistes, photographes et plasticiens sont ainsi organisées sur ces territoires et donnent lieu ensuite à des expositions individuelles ou collectives.

Avec cette 14ème édition, les Photaumnales n’étendent pas seulement leur vision à l’international, mais incluent de plus en plus d’espaces dans leur programme, dynamisant divers territoires et communes de Picardie. Aux côtés des habitués comme les villes de Beauvais et de Clermont, le festival compte aussi des espaces d’expositions à Amiens, Tergnier, Noyon, Saint-Aubin-en-Bray, et d’autres. Vous pourrez ainsi par exemple visiter l’exposition individuelle de Jean-Baptiste Barret à l’espace Matisse de Creil afin de découvrir ses portraits atypiques où de simples bidons de plastique jouent le rôle de masques tribaux.

Jean-Baptiste Barret – « Mythologiques aux bidons »

« Couleurs Hong-Kong » à l’espace Séraphine Louis : 3 visions complémentaires sur la mégapole

L’exposition « Couleurs Hong-Kong » rassemble les travaux de 3 photographes et plasticiennes ayant participé à une résidence d’un mois mis en place dans le cadre d’un partenariat entre Diaphane, l’Alliance française et le Hong-Kong International Photo festival. A la suite d’une précédente exposition ayant présenté 7 photographes, le Hong Kong Festival International Photo Festival a sélectionné Tina Merandon, Pascale Peyret et Beatrix Von Conta pour participer à cette résidence dans la mégapole chinoise. De ce projet en résulte 3 visions, à la fois différentes et complémentaires, sur cette ancienne colonie britannique, qui renouvellent son image et dépassent le stéréotype de la ville polluée, embouteillée et asphyxiée.

Beatrix Von Conta – « Hong-Kong au-delà des clichés »

Dans cet espace culturel, lové dans un vieil immeuble, anciennement le siège de la direction d’une prison du XVIIe siècle, chaque photographe se voit attribué un étage, en plus de déborder sur une salle commune. Le rez-de-chaussée est dédié au projet « Full Moon » de Tina Merandon et qui nous englobe, comme dans un cocon, par son intimité, ses couleurs vives, sa dominance de rouge et sa force visuelle. En cherchant à expérimenter sur les sensations, notamment celles liées à l’amour et au couple, la photographe a travaillé avec plusieurs amoureux et partenaires de danse sur des performances en lieux publics qu’elle capture ensuite en images.

Tina Merandon – « Full Moon »

Au deuxième étage, c’est au tour de Beatrix Von Conta de conter son expérience hongkongaise. Alors qu’elle débarque avec ses propres représentations d’une ville aux gratte-ciels innombrables et aux quartiers ultra modernes, elle finit par découvrir un autre pan de Hong-Kong, loin des clichés des guides touristiques, tout en contradictions, jouant entre le neuf et le traditionnel, entre l’urbain et le végétal. Et c’est dans ses photos, prises avec un numérique ou un iPhone 7, que l’on retrouve ses explorations des New Territories, ces quartiers récents plus excentrés mêlant des paysages verts aux éléments de ville. Ses collages de fleurs, de poissons, de marchés, parviennent aussi à nous happer dans l’effervescence d’une ville « où l’on finit par ne plus dormir » selon ses mots.

Beatrix Von Conta – « Hong-Kong au-delà des clichés »
Beatrix Von Conta – « Hong-Kong au-delà des clichés »
Beatrix Von Conta – « Hong-Kong au-delà des clichés »

Enfin, le troisième étage présente le travail de Pascale Peyret qui résume son impression de la mégapole en deux mots : « désorientation » et « immersion ». « C’est une ville qui pousse de partout, où les échafaudages de bambou se multiplient, les immeubles finissent par sortir de leur cocon et les mutations urbaines sont aussi sociétales », raconte la photographe. Plasticienne autant que photographe, elle complète ses photos de paysage mêlant nature et urbain, avec des vidéos retraçant le travail d’ouvriers sur des échafaudages et la construction d’installations éphémères, ainsi qu’avec des cartes et des captures d’écran de Google Earth. Avec « Greenside Paradise », elle cherche ainsi à montrer cette fourmilière en constant mouvement et la complexité de cette ville.

Pascale Peyret – « Greenside Paradise »‘
Pascale Peyret – « Greenside Paradise »‘

« Couleurs pays » au Quadrilatère : un focus photographique riche et varié sur les Caraïbes

Pour l’occasion, le Quadrilatère regroupe une trentaine de photographes dont les travaux, tous divers de par leur regard, leur époque, leur thème abordé, créent une véritable mosaïque de représentations des Antilles. Que ce soit sur la culture caraïbéenne, la construction de l’identité des deux îles, leur relation avec la métropole, les oeuvres photographiques se montrent tour à tour plutôt expérimentales, documentaires, sociales, historiques. A travers 5 thématiques, Identité, Mémoire, Créolité, Territoires et Emergences, les photographes contemporains se mêlent aux documents d’archives et fonds de collections privées.

Joseph Zobel – Photos de famille

Ainsi, dans ce vaste espace, aéré et éparpillé sur plusieurs niveaux, les photos personnelles et autoportraits de Joseph Zobel, romancier reconnu de la littérature antillaise et photographe à ses heures perdues, se retrouvent aux côtés des portraits gigantesques et impressionnants des Pierrotines, ces « mams », mères de famille en créole, d’Anabell Guerrero. Ou encore, après avoir découvert les séries documentaires de Jean-Luc de Laguarigue, sur les maisons abandonnées de Nord-Plage par exemple, Nadia Huggins sait nous transporter avec ses « Transformations », des portraits fusionnant sa propre identité et celles d’animaux marins.

Anabell Guerrero – « Les Pierrotines »
Jean-Luc de Laguarigue – « Nord Plage »
Nadia Huggins – « Transformations »

Marquées par l’histoire insulaire, celle de l’esclavagisme, et des immigrations, la Guadeloupe et la Martinique sont cependant d’une grande richesse et d’une grande complexité et c’est ce que permet de montrer cette exposition aux 30 visages. Notamment le travail de Robert Charlotte sur les « Garifunas et descendants » de l’île de Saint-Vincent, peuple issu du métissage entre esclaves noirs africains évadés et peuples autochtones des Caraïbes. « C’est un peuple qui se considère comme sans terre, sans frontière. Ce que je voulais montrer, justement, c’était le contre-pied de l’esclavage, celui de la liberté. De ce peuple qui n’a jamais été esclave, de ce peuple qui s’est battu et qui est resté libre. » Ses portraits, tous photographiés en extérieur à l’aide de flash et lumière artificielle et qui jonglent entre reportage, pose et spontanéité, sont en fait issus de ses rencontres au gré de ses déambulations sur l’île. Il cherche ainsi à montrer « la perpétuelle évolution des identités, leurs transformations et leurs influences au gré du temps ».

Robert Charlotte – « Garifunas et descendants »
Robert Charlotte devant l’un de ses portraits de la série « Garifunas et descendants »

Enfin, cette exposition compte aussi le travail de 2 photographes canadiens, Steve Veilleux et Robert Walker qui alimentent les « Couleurs Québec » de leur regard critique sur la société de consommation et la surabondance des images dans notre quotidien : le premier en déconnectant les panneaux publicitaires de leur environnement, le second en récupérant les codes publicitaires et en les repositionnant dans le paysage urbain.

Robert Walker – « New York, Chaos et Cacophonie »

Infos pratiques
Photaumnales 2017 – Diaphane
Du 14 octobre au 31 décembre 2017
L’ensemble des expositions est gratuit et en libre accès pendant les horaires d’ouvertures.
Pour plus d’informations sur les lieux d’expositions et le calendrier, allez voir le site des Photaumnales.