Vincent Munier, la photographie engendrée par l’amour de la nature

Nous avons eu l’occasion de rencontrer Vincent Munier lors du vernissage de son exposition à la Saison photo de l’Abbaye de l’Epau et nous en avons profité pour en connaître un peu plus sur son travail.

Initié à la photographie animalière dans le Massif des Vosges où il a grandi, Vincent Munier quitte désormais ses montagnes natales pour des milieux plus reculés qui lui offrent paysages et rencontres insolites. Il brave les températures extrêmes du Grand Nord pendant plusieurs mois à la recherche d’espèces sauvages rares, celles qui n’ont jamais rencontré l’homme.

© Vincent Munier

« Je ne suis pas un fou de la photographie », nous a-t-il dit très modestement.

Vincent Munier est avant tout un admirateur de la nature, qu’il prend le temps d’observer et de connaître un peu plus à chacun de ses voyages. Il se considère comme un contemplatif, il passe davantage de temps à observer qu’à appuyer sur le déclencheur, la nature le fascine.

Les grands espaces blancs de l’Arctique sont pour lui une échappatoire à l’égocentrisme de l’espèce humaine. Un cadre ouvert à la méditation, à la plénitude, loin de la société consommatrice qui conditionne l’homme à l’urgence, Vincent Munier prend le temps et savoure cette liberté. La nature lui a appris l’école de la patience qu’il témoigne aujourd’hui par la photographie.

Raymond Depardon a énoncé à propos du métier de photographe, « il faut aimer la solitude pour être photographe » et c’est ce caractère solitaire que Vincent Munier entretient. Il réalise ses expéditions la plupart du temps seul, pour mieux appréhender la nature et vivre les sensations plus intensément. Il adapte son comportement photographique à chaque espèce pour que son approche ne dérange pas l’animal, qu’il puisse en saisir l’authenticité. Il travaille notamment avec un téléobjectif, à la fois pour se protéger et pour respecter les espèces dans leur environnement. Alors que l’ours polaire ne se fie pas à sa présence, il lui arrive parfois de se camoufler entièrement pour voler, quelques fragments de secondes, l’intimité des animaux qui tentaient de lui échapper.

« C’est ce que j’aime dans la photographie animalière, rien n’est sûr » explique-t-il.

© Vincent Munier

De ses photos de l’Arctique, Vincent Munier cherche à dévoiler le respect que la nature impose. Il qualifie le photographe de « passeur », celui qui a le pouvoir de transmission et d’émotion. Pour le premier tome de son album « Solitudes », il a choisi principalement des paysages en plan panoramique horizontaux afin d’amener son spectateur à reconsidérer la place infime qu’il représente face à ces immenses étendues blanches.

Il ne cherche pas à donner à son travail un caractère militant pour l’environnement. Les photographies du Grand Nord qu’il propose sont extraites de voyages qu’il a effectués sur une dizaine d’années. Il a donc pu appréhender les évolutions et changements écologiques qui s’opèrent au pôle de la planète. Son choix de retourner sur un même lieu émane d’une volonté de vivre la nature, de se rapprocher un peu plus à chaque fois de l’état animal originel.  Il a ainsi attendu cinq ans avant d’apercevoir le Loup arctique ou « fantôme de la Toundra » et de le photographier. Quelques-uns de ses clichés contiennent un message implicite, il laisse aux spectateurs le choix de se sentir impliqués et de le découvrir.

© Vincent Munier

La série « Solitudes » ainsi que d’autres photographies prises en Arctique sont exposées à la Saison photo de l’Abbaye de l’Epau jusqu’au 18 septembre 2016. Le thème de la biennale est « Une invitation au voyage » et le voyage en Sarthe vaut le détour. Alors que Vincent Munier a donné au titre de son travail une dimension plurielle pour évoquer la solitude des grands espaces, des animaux et du photographe lui-même, la scénographie de l’exposition en apporte une autre encore. A l’image du caractère solitaire que la photographie de Vincent Munier inspire, ses œuvres sont installées dans l’Eglise abbatiale de l’Epau. Le lieu offre une luminosité estivale qui éclaire subtilement les cadres et l’immensité et la fraicheur de la pierre appellent au recueillement, à une solitude d’un instant. Une simplicité et une pureté qui proposent une exposition très personnelle et c’est cette ligne de conduite que suit également l’artiste dans ses publications. Vincent Munier a créé sa propre maison d’édition, Kobalann, afin de réaliser entièrement ses albums et offrir un rendu intime et authentique à ses admirateurs.


Les photographies de Vincent Munier sont un appel aux rêves, il a réussi à réaliser ceux de son enfance et les partagent à présent en image avec une grande générosité.

Quelques liens pour approfondir :