DJI officiellement banni aux États-Unis : la FCC ferme le marché américain aux drones étrangers

Les drones DJI, utilisés par des millions de photographes, vidéastes et professionnels à travers le monde, ne pourront plus être vendus aux États-Unis. La FCC vient d’inscrire le géant chinois sur sa liste noire, invoquant des risques pour la sécurité nationale. Une décision lourde de conséquences pour tout le marché du drone.

DJI Mini 3 Pro

L’industrie du drone connaît un tournant décisif : la Federal Communications Commission (FCC) a inscrit DJI, Autel Robotics et tous les drones fabriqués à l’étranger sur sa « Covered List », les jugeant à risque pour la sécurité nationale américaine.

Cela rappelle fortement l’épisode de 2020, mais cette fois, le signal paraît nettement plus sérieux. Annoncée juste avant l’échéance fixée par le Congrès, cette décision vient clore plusieurs années de tensions autour des drones chinois.

Gros changement aux États-Unis

Désormais, aucun nouveau modèle de drone étranger ne pourra obtenir l’autorisation de la FCC nécessaire à son importation, sa commercialisation ou sa vente sur le territoire américain. Cette mesure ne concerne pas uniquement DJI et Autel : elle s’étend à tous les drones et composants critiques produits hors des États-Unis, incluant les systèmes de transmission de données, les contrôleurs de vol, les stations au sol, les capteurs, les caméras, les batteries et les moteurs.

Point important pour les utilisateurs actuels : les drones déjà autorisés et en circulation ne sont pas concernés par cette interdiction, la fameuse « clause du grand-père ». Les propriétaires américains de DJI Mavic 4 Pro, Mini 5 Pro ou autres modèles existants peuvent continuer à les utiliser normalement. Les revendeurs peuvent également écouler leurs stocks de modèles déjà homologués. Aucun rappel n’est prévu et les appareils ne seront pas désactivés à distance.

L’administration Trump assume une politique de sécurité

Le président de la FCC, Brendan Carr, a clairement affiché l’objectif de cette mesure sur le réseau social X : « Le président Trump a été clair sur le fait que son administration agira pour sécuriser notre espace aérien et libérer la domination américaine dans le secteur des drones. »

Cette décision s’inscrit dans le prolongement du National Defense Authorization Act de 2025, adopté par le Congrès l’an dernier, qui exigeait un audit de sécurité des équipements DJI et Autel avant le 23 décembre 2025. Faute de conclusion de cet audit, l’interdiction est tombée par défaut.

La FCC invoque plusieurs motifs de sécurité nationale : les risques de surveillance non autorisée, d’exfiltration de données et d’opérations destructives potentielles sur le territoire américain.

L’agence souligne également la préparation des États-Unis à accueillir plusieurs événements majeurs dans les années à venir, notamment la Coupe du monde de football 2026 et les Jeux olympiques de Los Angeles en 2028, nécessitant une vigilance accrue face aux menaces par drones.

DJI dénonce une décision « non fondée sur des preuves »

Le géant chinois, qui détient environ 70 à 80 % du marché mondial des drones et plus de la moitié des ventes de drones commerciaux aux États-Unis selon les analystes, a immédiatement réagi. Dans un communiqué transmis à la presse, un porte-parole de DJI conteste fermement la justification sécuritaire de cette mesure : « Les inquiétudes concernant la sécurité des données de DJI ne sont pas fondées sur des preuves et reflètent au contraire un protectionnisme, contraire aux principes d’un marché ouvert. Les produits DJI sont parmi les plus sûrs et les plus sécurisés du marché, soutenus par des années d’audits menés par des agences gouvernementales américaines et des tiers indépendants. »

Drone agricole DJI Agras T50

DJI rappelle avoir demandé à plusieurs reprises, depuis mars 2025, aux autorités américaines de procéder à l’audit de sécurité prévu par la loi. Des appels restés sans réponses.

Le gouvernement chinois a également réagi à cette annonce. Lin Jian, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a qualifié l’inscription sur la liste de la FCC de « discriminatoire » : « Les États-Unis devraient corriger leurs pratiques erronées et fournir un environnement équitable, juste et non discriminatoire pour les entreprises chinoises. »

Un séisme pour les professionnels américains

Cette décision aura des répercussions majeures sur de nombreux secteurs aux États-Unis. Selon DJI, plus de 80 % des agences de sécurité publique américaines (pompiers, services de secours, police locale) utilisent ses drones pour des missions allant de la lutte contre les incendies à la recherche de personnes disparues. L’agriculture, la construction, l’inspection d’infrastructures, la cartographie aérienne et bien sûr la photo et vidéo professionnelles dépendent également largement des équipements DJI.

Même si les drones actuellement sur le marché ne sont pas concernés, il faudra revoir les prochains équipements pour ces agences. Les Etats-Unis comptent cependant beaucoup sur les fabricants de drones américains.

C’est le cas de Hylio, un fabricant de drones agricoles. Son PDG Arthur Erickson estime que le départ de DJI libérera l’espace nécessaire au développement des entreprises américaines. Mais il qualifie également l’extension de l’interdiction à tous les drones étrangers de « folle » et « inattendue », soulignant l’existence d’une chaîne d’approvisionnement mondiale alliée.

En effet, pour ces derniers, il va falloir fabriquer tous les composants sur le sol américain, que ce soit les moteurs, les batteries ou encore les contrôleurs. Pour autant, certains constructeurs comme le français Parrot – avec le modèle Parrot Anafi USA – ou l’américain Skydio fabriquent déjà l’intégralité de leurs drones aux Etats-Unis, mais principalement pour le militaire ou les entreprises.

Une porte de sortie encore possible

La FCC a toutefois laissé une possibilité d’exemption. Le Département de la Défense ou le Département de la Sécurité intérieure peuvent accorder des dérogations spécifiques s’ils estiment qu’un drone ou une catégorie de drones ne présente pas de risque inacceptable. DJI a d’ailleurs souligné dans son communiqué que « de nouveaux produits pourraient, à l’avenir, être autorisés au lancement sur la base de déterminations prises par le Département de la Défense et le Département de la Sécurité intérieure ».

Cette décision s’inscrit dans un mouvement plus large de découplage technologique entre les États-Unis et la Chine. DJI rejoint sur la Covered List des entreprises comme Huawei, ZTE, Hikvision et Dahua, déjà interdites pour des motifs similaires de sécurité nationale.

Pour les photographes et vidéastes américains, l’ère des nouveaux drones DJI sur le sol américain est officiellement terminée, du moins pour l’instant.