Né en 1964, Juergen Teller est souvent qualifié de provocateur, voire de sulfureux : quoi qu’il en soit, il est certain que ce photographe allemand est considéré comme l’un des incontournables de la photographie commerciale, du portrait de célébrités et de l’art contemporain, et ce depuis de nombreuses années. Le Grand Palais éphémère lui a consacré une grande exposition, à découvrir jusqu’au 9 janvier 2024.
Des mises en scènes à l’ironie parfois mordante qui se mêlent, comble du paradoxe, à une spontanéité indéniable : les photographes de Juergen Teller ne laissent personne de marbre. Cette réputation de provocateur, qui semble lui former comme une seconde peau, tient sans doute de la forte teneur sexuelle de nombreuses de ses photographies.
Pourtant, il ne fait que mettre de côté l’érotisme au profit d’un réalisme poussé à son paroxysme, jusqu’aux limites de la pornographie. Un ultraréalisme ultracontemporain, qui fait de chacune de ses photographies un bref instant de vie parmi tant d’autres, fragment d’une série artistique (presque une chronique) en perpétuelle élaboration.
C’est ainsi qu’il atteint l’intimité la plus absolue : la sienne, d’abord, et celle de ses proches, avec ses autoportraits burlesques et ses mises en abime de ses propres archives, et celle des autres, ensuite et surtout, ce qui appelle à une certaine admiration quand il s’agit de célébrités de prime abord inaccessibles. C’est lui – et lui seul pouvait atteindre ce résultat avec sa démarche – qui a photographie Björk et son fils, dans les sources chaudes d’Islande, Agnès Varda avec un chat (évidemment), ou encore l’icône Iggy Pop.
Cet attrait pour le burlesque lui a fait faire parmi les meilleures photographies de mode modernes, avec ce style spontané bien à lui… un style qui se démarque considérablement des canons esthétiques habituels de la photographie promotionnelle (notamment celle des produits de luxe), présupposée impeccable, sans défaut.
Plus que ça : les photographies de mode de Juergen Teller frôlent parfois l’effroi, un sentiment contradictoire au possible… qu’on associe rarement au luxe et au raffinement (à l’instar de sa campagne printemps-été 2019 pour Saint-Laurent). Un sentiment contemporain, en somme – et la boucle est bouclée.
Yves Saint Laurent Paris 2000 © Juergen Teller, All rights Reserved
Jusqu’au 9 janvier 2024, Juergen Teller devient le 1er photographe à s’emparer des 10 000 m2 du Grand Palais éphémère, sous l’égide du commissaire Thomas Weski. Que ce soit par la scénographie ou la sélection des images, « I need to live » se démarque singulièrement et propose une plongée inédite dans le travail considérable de l’artiste, avec près de 700 tirages, 300 documents et 5 films. Notez qu’un catalogue a été édité conjointement à l’exposition, disponible aux éditions Steidl au tarif de 30 €.
Informations pratiques :
i need to live, Juergen Teller
Grand Palais Éphémère
Du 16 décembre 2023 au 9 janvier 2024
Place Joffre, 75007 Paris
Tous les jours de 10h à 19h
Tarif : 15 euros (réduit : 11 euros)
