Arina Starykh, jeune photographe basée à Arles, tisse à travers ses œuvres des récits explorant la corporalité, le subconscient, et la dynamique des relations familiales. Sa démarche artistique mêle la photographie documentaire stylisée à des éléments d’autofiction.
Dans sa série Le sang est plus épais que l’eau (Blood is thicker than water), Starykh nous invite à franchir la porte de sa maison familiale en Russie, nous entraînant dans une quête personnelle et universelle à laquelle de nombreux spectateurs pourront s’identifier.
Arina Starykh : montrer celles à qui beaucoup ont tourné le dos
Pour ce projet, Arina Stayrkh a photographié les femmes de sa famille : sa grand-mère, sa mère et ses tantes, dans la maison natale de leur village.
D’aussi loin que je me souvienne, dans ma famille, les femmes ont été plus présentes que les hommes. Je n’ai jamais connu mon père ; mon grand-père est mort jeune ; mes deux arrière-grands-pères ont disparu à la guerre.
Arina Starykh
Natures mortes ou « portraits » de dos témoignent de ce qui se passe derrière les portes closes des maisons, dans l’intimité d’une famille typique d’un village russe. Ce sont des scènes de vies domestiques, habituellement cachées des regards extérieurs, qui sont dépeintes.
« Mon objectif était de capturer ces moments intimes que personne d’autre n’est censé voir. La façon dont les femmes de ma famille nettoient la maison, s’habillent, cuisinent, se parlent et célèbrent les fêtes orthodoxes est très spéciale et me ramène à mes souvenirs d’enfance », explique la photographe.
Fuyant l’objectif par timidité et humilité, les modèles de la photographe sont photographiées de dos, leurs silhouettes apparaissent floues, comme si ces femmes s’effaçaient peu à peu. Cette absence de regard, pour la photographe et son spectateur c’est aussi faire face à la dureté de la vie quotidienne de ces femmes qui, génération après génération, n’ont jamais vraiment eu l’occasion de se regarder intimement, ni d’être jamais vues pour ce qu’elles sont au plus profond d’elles-mêmes.
Pour Arina Starykh, ces images transcendent la simple notion de photographies familiales. Elles incarnent la poésie inhérente à la vie quotidienne et sa vulnérabilité.
Pour prendre place dans ce récit familial et rejoindre les siennes dans leur combat muet, Arina Starykh a inclus ses autoportraits à la série. « J’avais besoin de m’approprier une partie de cette grande histoire, de trouver ma place et de comprendre ce que c’est que d’être elles, d’être avec elles, pour elles et après elles. »
Un livre en devenir
La série Le sang est plus épais que l’eau peut aussi se découvrir au fil des pages du livre photo réalisé en un seul exemplaire par l’artiste photographe. Dans cet ouvrage, ses photographies personnelles côtoient des archives familiales, tissant l’histoire de générations de femmes et de leurs liens indissolubles. Starykh rend hommage à sa grand-mère en enveloppant la couverture du livre de sa robe de chambre, symbolisant ainsi l’intimité et la continuité des liens familiaux à travers le temps.
La photographe est actuellement à la recherche d’un éditeur ou d’une maison d’édition pour permettre au public de faire entrer son livre dans leur propre intimité.
Le travail d’Arina Starykh est à découvrir sur son site internet.