Dubai - © Robert Schlaug

Limited Area de Robert Schlaug : un voyage à travers des paysages finis

Peu de sujets semblent plus immuables qu’un vaste champ naturel ou anthropisé, s’étendant à perte de vue, comme infini. Jouant sur cet impérissable imaginaire, Robert Schlaug invite pourtant à une immersion dans des paysages dramatiquement finis avec sa série Limited Area.

Avila, España © Robert Schlaug

Urbains pour l’un, ruraux pour les autres, les clichés de l’artiste autodidacte allemand parlent à quiconque. Collines, routes ou voies ferrées sont autant de sujets classiques, que n’importe quel photographe professionnel ou amateur a déjà capturés, avec ou sans prétention.

Valedepeñas, Ursprungsnummer © Robert Schlaug

C’est cette familiarité qu’éprouve Robert Schlaug en striant ces images ordinaires par de savantes retouches numériques. Chaque pixel de la ligne d’horizon, ou du premier plan, est reproduit indéfiniment à la verticale. Il en résulte d’innombrables barres de couleur occupant une grande partie du champ, stoppant nette la perspective au profit d’un rideau zébré digne de l’affichage d’un ordinateur en fin de vie.

L’impression de brouillage, d’inaccessibilité, voire d’enfermement qui s’en dégage est intentionnelle. Il s’agit bien de remettre en question notre approche habituelle d’un paysage, en forçant l’observateur à une forme de focus sur la – petite – zone nette.

Luftaufnahme España, Ursprungsnummer © Robert Schlaug

Les stimuli visuels sont devenus si présents dans notre quotidien qu’on n’y prête plus attention, pour ne retenir que quelques images qui nous marquent. Prenant à bras-le-corps cette apparente banalité, le photographe incite, par cette série, à ralentir.

Des paysages ordinaires sont ainsi transformés en scènes plus glaçantes qu’apaisantes. Parmi d’autres, une piste d’aéroport semble désormais se situer au-dessus d’un mur abrupt, proche et pourtant impossible à atteindre.

Gibraltar, Ursprungsnummer © Robert Schlaug

Cette impression est voulue : « parfois on a l’impression d’être allé dans le mur ou de se trouver au bord du gouffre, sans savoir comment avancer. Ou alors un insurmontable mur se dresse face à nous, et nous ne savons pas comment y échapper. Même nos pensées et notre imagination atteignent leurs limites« , appuie le photographe.

Avec peu de choses, la série Limited Area s’impose comme un jeu astucieux de restriction du champ, où le sujet se trouve « capturé » (au sens littéral du terme) par le photographe, qui lui impose ses propres limites.

Vous pouvez retrouver l’intégralité du travail de Robert Schlaug sur son site Internet et son Behance.