Evénement surprenant dans le monde des réseaux sociaux : l’annonce de la cession de Giphy par Meta à Shutterstock le 23 mai dernier. Pourtant acquise en 2020 pour la somme de 400 millions de dollars, le géant américain revend la plateforme de GIFs à prix cassé en y laissant plusieurs centaines de millions de dollars, suite à une injonction des autorités britanniques. Retour sur cette histoire.
GIPHY, kesako ?
Plateforme en ligne de Gifs animés créée en 2013, Giphy s’est rapidement hissée à la tête du marché très concurrentiel et convoité de la vidéo virale.
Permettant à la fois la recherche, le partage et la création de gifs animés, Giphy se démarque avant tout par la taille démesurée de sa bibliothèque de contenus et sa très bonne intégration au sein des différentes applications mobiles sur nos smartphones. Au-delà de sa bibliothèque, le site américain permet également aux utilisateurs de créer leurs Gifs animés en téléchargeant ses propres contenus, transformables directement au sein du site.
Un rachat en grande pompe par Meta
Connu pour son appétit vorace, le groupe Meta (anciennement Facebook) rachète Giphy en 2020 pour la modique somme de 400 millions de dollars, plaçant d’office cet achat à la cinquième place des plus grosses acquisitions de la firme américaine.
Après Instagram en 2012 et WhatsApp en 2014 (dont le montant du rachat est toujours le plus important déboursé par Meta; avec un colossal 19 milliards de dollars), le rachat de Giphy permettait à l’américain d’intégrer plus facilement les GIFs à ses plateformes, notamment Instagram, Ce rachat faisait notamment suite à l’usage systématique par Facebook de l’API de GIPHY depuis plusieurs années ; annonçant vouloir investir davantage dans sa technologie.
Une union de courte durée
Ci-tôt acheté, Meta est rapidement tombé sous le joug de la CMA (Competition and Markets Authority), l’autorité de régulation de la concurrence au Royaume-Uni via ses lois antitrust en vigueur. Une première enquête est ainsi suivie d’une condamnation avec une amende d’une valeur de 50,5 millions de livres (environ 58 millions d’euros) en octobre 2021.
Le régulateur jugea en effet que cette acquisition engendrait un risque de concurrence déloyale, octroyant à Facebook un accroissement de son emprise, risquant potentiellement d’interdire l’accès à la plateforme de GIFs à d’autres réseaux sociaux. Malgré l’amende, l’enquête s’est poursuivie, et le verdict de la CMA est tombé en octobre dernier : Meta devait céder Giphy.
Après avoir épuisé tous ses recours, Meta se résigne et cède. 7 mois après son ordonnance, la commission anglaise oblige ainsi le géant américain à se séparer de son acquisition récente.
Contraint juridiquement et pressé par le temps, Meta est alors forcé de se trouver un acheteur dans un délai de 6 mois, imposé par la CMA ; seul Shutterstock s’est alors présenté pour les sortir de cette situation au prix d’une perte financière colossale.
L’arrivée de Shutterstock dans la partie
Entreprise spécialisée dans les banques d’images, vidéos et sons libres de droit, Shutterstock est aujourd’hui l’une des plateformes leader dans la production de ressources visuelles en ligne. Fondée en 2003, elle regroupe la plus vaste bibliothèque de contenus libres de droits, regroupant 257 millions de fichiers.
Le 26 mai dernier, Shutterstock a publié un communiqué annonçant son rachat de Giphy à Meta pour seulement 53 millions de dollars. Bien que la vente n’imposait aucune obligation de valorisation, c’est finalement le temps qui aura manqué à Meta, engendrant cette vaste perte financière – Meta ayant acheté Giphy 400 millions de dollars en 2020, pour rappel.
C’est une belle opportunité pour Shutterstock. Lors de l’annonce de ce rachat, Paul Hennessy, PDG de la firme, indiquait que « Shutterstock avait pour mission d’aider les personnes et les marques à raconter leur histoire. Grâce à l’acquisition de GIPHY, nous élargissons nos points de contact avec le public au-delà des cas d’utilisation professionnels du marketing et de la publicité, et nous nous étendons aux conversations informelles. »
Shutterstock a cependant des plans pour monétiser ce large catalogue de GIFS, notamment auprès des marques : « Nous prévoyons d’exploiter les capacités uniques de Shutterstock en matière de monétisation du contenu et des métadonnées, d’IA générative, de production en studio et d’automatisation créative pour permettre la commercialisation de notre bibliothèque de GIF au fur et à mesure que nous déployons cette offre auprès des clients » a indiqué Paul Hennessy.
Que les utilisateurs de GIPHY se rassurent : pour le moment, l’outil de création et partage de GIF reste ouvert à toutes les plateformes. Vous pouvez donc continuer à partager ce GIF de Grumpy Cat en toute quiétude.
