Houlgate vit au rythme de la photographie conjuguée au féminin du 7 juin au 3 septembre 2023. La sixième édition du festival Les femmes s’exposent continue d’interroger la place des femmes photographes dans la photographie contemporaine.
Sommaire
Un festival à mission
Les Femmes s’exposent a pour mission de soutenir, valoriser et récompenser les photographes féminines, encore tenues dans l’ombre de leurs confrères masculins et peu représentées dans les programmations culturelles.
Du documentaire aux portraits, tous les domaines sont représentés. Inégalités socio-économiques, réchauffement climatique, vieillissement de la société, mutations culturelles, interrogations intimes et identitaires sont autant de sujets dans le viseur des photographes professionnelles exposées en Normandie.
Conscient des enjeux que l’intelligence artificielle fait peser sur la profession, le festival normand a fait de la créativité et de la pertinence les mots d’ordre de sa sélection 2023 exposée en plein air. Lors de son week-end d’ouverture le festival a récompensé Natalya Saprunova et Kamila K Stanley, lauréates des deux prix valorisant le travail de femmes photographes.
Femme, Vie, Liberté
Une exposition est consacrée au travail de la photojournaliste iranienne Forough Alaei. Engagée auprès de ses compatriotes, cette dernière prend part à leur lutte héroïque contre le conservatisme et la domination masculine. Précédemment récompensée pour sa série consacrée aux femmes supportrices de football, Forough Alaei met cette fois à l’honneur à Houlgate le courage de femmes iraniennes unies derrière le slogan « Femme, Vie, Liberté »
Habiter l’espace
Lauréate d’une bourse de résidence à Houlgate, Roxane Daumas brouille les genres. Photographies colorisées et utilisation de la gomme bichromatée croisent fiction et réalité dans des photos témoignant des mutations de la ville de la fin du XIXe à nos jours.
Seconde lauréate de la bourse du festival, Édith Roux s’est rendue en Virginie pour nous proposer Twin Oaks. Des images saisies par la photographe en vivant auprès d’une communauté créée en 1967 autour des valeurs de durabilité et entraide. Soit une autre façon d’habiter le monde à l’ère de l’anthropocène.
Sanne Derks expose son Manifeste de L’eau réalisé à Cuba pour témoigner de l’accès difficile à l’eau potable pour la population de l’île.
Quant à Noriko Ayashi, elle contemple le vieillissement de la population nippone et place dans son viseur les transformations qu’il incombe à la société japonaise.
Margaux Senlis propose à Houlgate de s’approcher au plus des ruches en rendant compte des défis actuels pour l’apiculture, avec notamment l’extinction des abeilles pollinisatrices.
Le continent africain, dépositaire de nos excès
L’industrie de la mode est, c’est désormais bien connu, émettrice d’une grande part de nos émissions carbone. Pour Destination Finale : Ghana, Isabelle Serro suit le fil des vêtements que nous déposons dans les bacs de recyclage. La grande majorité est tristement appelée à polluer les pays émergents transformés en poubelles de l’hémisphère nord. Chaque semaine ce sont 15 millions de vêtements qui inondent le Ghana, ses rivages et ses 32 millions d’habitants.
En Afrique, Adrienne Surprenant prend de la hauteur pour témoigner de la disparition annoncée des glaciers africains méconnus, dont ceux du mont Kenya. Aux côtés de bergers, d’agriculteurs et d’un guide local, la photographe imagine la vie d’après pour ce territoire et ses habitants.
La photo comme miroir
À Houlgate le portrait se fait thérapeutique. Derrière son objectif la photographe Isabelle Chapuis interroge la mémoire du corps et rend compte de la singularité de l’individu. Seule ou en collaboration avec d’autres artistes plasticiens, Isabelle Chapuis offre une profondeur renouvelée à la pratique photographique.
Cette approche de l’image est en quelque sorte partagée par la photographe coréenne JeeYoung Lee (이지영) qui met en scène ses émotions dans son studio photo. La photographe imagine et construit d’incroyables décors théâtraux au sein desquels elle place un modèle devenant son double. À l’image succède ensuite la catharsis de détruire ce décor poétique tenu à l’éphémère.
Quant à Kamila K Stanley, lauréate du Prix SAIF x les femmes s’exposent, elle souligne avec brio la manière dont la violence subit au Brésil pr la population LGBTQIA+ s’apparente à celle subie par le vivant. Une exposition d’automne à La Maison des Photographes permettra de découvrir la série Tenha Orgulho / Sois fier·e.
L’identité culturelle au-delà des apparences
Avec sa série Les Madjinis à Mayotte, la photographe française Bénédicte Kurzen montre une facette plus spirituelle et intime d’une France métissée de mythes et croyances hérités des premiers peuples swahilis.
Pour Ana Mendez, derrière le folklore pittoresque entourant les peuples autochtones d’Amazonie se révèlent des réflexions individuelles intimes et profondes affranchies des stéréotypes. Les images de la photojournaliste documentaire s’attachent à les révéler.
Au fil des photos de Saamis, nous vivions dans la toundra, Natalya Saprunova suit le dernier peuple nomade autochtone d’Europe désormais contraint à la vie sédentaire. Ses compositions dépeignent un quotidien dans lequel la revendication de leur identité culturelle ancestrale peine à résister. Natalya Saprunova a été récompensée du Grand Prix Fujifilm X les femmes s’exposent pour Permafrost, le froid n’est plus éternel, une série démontrant le changement climatique en cours en Russie, où le dégel partiel de couches profondes est en cours.
Toutes les femmes exposées lors de ce festival contribuent à briser les stéréotypes comme les frontières.
Informations pratiques :
Les femmes s’exposent
Ville de Houlgate
Du 7 juin au 3 septembre 2023
Expositions en accès libre dans la ville
Entrée libre
