CP+ 2023 : rapport CIPA, le marché de la photo entre résilience et montée en gamme

Le salon CP+ de Yokohama a été l’occasion pour la Camera & Imaging Products Association (CIPA) de dévoiler son dernier rapport sur le marché de la photo. Parmi les grandes tendances observées, on notera la nette croissance en valeur, tant pour les boîtiers que les objectifs – reflet direct de l’augmentation croissante du prix des matériels photo.

La CIPA revient également sur la répartition géographique des ventes de boîtiers photo, mais également sur le nombre des utilisateurs de smartphones qui font l’acquisition d’un boîtier photo pour obtenir une meilleure qualité d’image.

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Le marché de la photographie en 2022 en résilience

Assez peu connue du grand public, la Camera & Imaging Products Association (CIPA) est une organisation fondée en 2002. Elle regroupe les fabricants d’appareils photo (Canon, Nikon, Sony, Panasonic, Fujifilm, Sigma, Tokina, Hoya, OM Digital Solutions, Ricoh et Epson) et vise ainsi à « contribuer à la réussite commerciale de ses membres par le biais de diverses activités visant à assurer un environnement commercial équitable ». Ses rapports réguliers offrent un bon état des lieux du marché mondial de la photographie.

Lors du CP+ 2023, Gaku Ota, président du sous-comité des enquêtes et statistiques de la CIPA (Camera & Imaging Products Association) a dévoilé les résultats de sa dernière étude sur le marché mondial de la photographie.

En premier lieu, cette étude pointe la légère baisse du nombre total d’expéditions d’appareils photo (-4,2 %) par rapport à 2022. En revanche, les expéditions d’appareils photo à objectifs interchangeables sont en hausse de 10,8 % par rapport à 2021.

Cela étant, cette croissance est à relativiser. En volume, le marché reste en deçà des valeurs de 2019 (environ -30 %). Et, dans les faits, il stagne au niveau de 2020 – soit son plus bas niveau depuis 2006. Le marché peine donc à se relever du Covid et de ses multiples conséquences.

Les ventes de boîtiers compacts quant à elles n’en finissent pas de se contracter, concurrencés de plein fouet par les smartphones depuis une dizaine d’années. Pour autant, il est clair aujourd’hui que le marché des boîtiers photo a connu une véritable transformation, avec une croissance non plus en volume, mais en valeur.

Une croissance en valeur

Cet aspect est particulièrement intéressant à étudier. Si le nombre total d’appareils photo à objectifs interchangeables (reflex et hybrides) et d’objectifs augmente légèrement, leur valeur n’a cessé d’augmenter au cours de ces dernières années. À tel point que les chiffres de 2022 dépassent ceux des années 2017 et 2018 – les dernières années bénéfiques avant l’irruption du Covid.

Autre point notable, les objectifs contribuent nettement à la croissance de ce marché – signe que les utilisateurs de boîtiers à objectifs interchangeables sont prêts à investir dans une ou plusieurs optiques supplémentaires pour leur boîtier. Concrètement, 9,7 millions d’objectifs ont été vendus dans le monde en 2022 (contre 5,9 millions de boîtiers). Ainsi, pour chaque boîtier expédié, l’équivalent de 1,6 objectif a également été livré.

En termes de répartition, on notera également que si les compacts numériques représentent 26 % du volume total à l’échelle mondiale, ils n’incarnent que 10 % de la valeur totale. Dit autrement, 90 % de la valeur est aujourd’hui créée par les reflex et les hybrides.

Par ailleurs, le marché est tiré vers le haut par les hybrides. Si les reflex représentent 1/3 du total des ventes de boîtiers dans le monde, ils n’incarnent que 14 % de la valeur totale.

Une nette hausse du prix des boîtiers photo

Ce rapport met aussi en lumière la flambée du prix moyen des équipements photo – et plus particulièrement des appareils photo hybrides. Une double-tendance est ici à observer à partir de 2017. Ainsi, le prix moyen des boîtiers reflex a légèrement baissé, se stabilisant à 50 000 yens (environ 344 €).

En revanche, le prix moyen des hybrides atteint 130 000 yens (environ 895 €) – et a plus que doublé en trois ans. Le marché de la photographie se transforme donc en un marché de niche de plus en plus spécialisé.

Ainsi, le nombre de consommateurs faisant l’acquisition d’un appareil photo stagne ; mais ces derniers sont davantage prêts à investir un budget plus élevé pour leur hybride et leurs objectifs. Et, dans le même temps, les différents constructeurs ont considérablement augmenté le prix de leurs boîtiers – notamment pour absorber les coûts en R&D des boîtiers hybrides.

L’Asie, moteur de la croissance du marché de la photo

La répartition géographique des ventes de matériels photo est aussi intéressante à étudier. Si la part représentée par les continents américains et européens reste globalement stable (respectivement 25 et 30 % du volume total), celle de l’Asie ne cesse d’augmenter.

Point notable : la CIPA a décidé de mettre en lumière plus spécifiquement la part représentée par la Chine à partir de 2019. Résultat, la part du géant asiatique n’en finit pas de croître, passant de 10 % en 2019 à 16 % en 2022. 

Au total, le continent asiatique représente ainsi plus de 40 % du volume total des achats de matériels photo à l’échelle mondiale, montrant l’appétence du grand public pour la photographie.

Le rapport de la CIPA permet aussi d’en apprendre davantage sur le passage du reflex à l’hybride par continent. Sans surprise, l’Europe et le continent américain restent encore relativement fidèles aux reflex, où ce format représente encore 41 % du volume des ventes. En Asie, en revanche, les hybrides incarnent plus de 80 % du volume – avec un pic à 85 % pour le Japon.

Une part croissance d’utilisateurs venant du monde des smartphones

Last but not least, cette étude de la CIPA montre la part croissance d’utilisateurs de smartphones – et qui se tournent assez largement vers un boîtier photo dédié

« Un grand nombre de personnes sont devenues des photographes chevronnés avec un smartphone. Ainsi, les boîtiers numériques à objectifs interchangeables viennent catalyser cette volonté de capturer de meilleures photos, et des clichés qu’ils ne pouvaient pas prendre auparavant », indique l’étude.

Au cours d’une enquête qualitative menée par la CIPA en 2022, de nombreux photographes mettent en exergue la qualité des clichés que leur boîtier leur permet d’obtenir (comparé à un smartphone). Les photographies de sport, les couchers du soleil, les clichés nocturnes reviennent à plusieurs reprises comme autant de domaines où les performances des boîtiers photo sont largement supérieures à celles des smartphones.

De nombreux sondés mentionnent également le plaisir ressenti en utilisant leur appareil photo, en effectuant une sortie photo avec leur boîtier, et en capturant des photos telles qu’ils l’ont pensée (en jouant avec la lumière, par exemple). 

Enfin, bon nombre d’entre eux insistent sur l’aspect « mémoriel » : la photo procure ainsi une plus grande émotion lorsqu’elle a été capturée avec un boîtier photo, indique l’une des personnes interrogées.

Le CP+ 2023 : un bon indicateur de l’état du marché de la photographie

Cette nouvelle édition du CP+ (la première depuis 2019) peut également jouer un rôle de thermomètre du marché de la photo en ce début d’année 2023.

Phototrend CP+ 2023

Si les ventes d’appareils photo restent très loin du pic historique des années 2000 (lié à la bulle des compacts numériques), le marché s’est largement consolidé. Mais surtout, il semble faire preuve d’une certaine résilience après les aléas liés au Covid-19. 

Le rapport insiste d’ailleurs sur la dimension multifactorielle de cette baisse en 2020, provoquée à la fois par les mises à l’arrêt des usines– mais aussi l’impossibilité de voyager, qui a retardé les achats de matériels par les consommateurs.

Dans tous les cas et si on le regarde avec un brin d’optimisme, le marché de la photo semble faire preuve d’une petite reprise avec, surtout, une croissance en valeur très marquée tant du côté des boîtiers que des objectifs. En espérant que cette montée en gamme ne vienne pas casser cette reprise en continuant à proposer des produits abordables.

La présentation de cette étude de la CIPA est à retrouver dans cette vidéo (en japonais, non sous-titrée) et sur le site Internet de la CIPA.

Responsable éditorial

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  1. Le bond technologique de ces dernières années est tel qu’il permet de savoir se contenter du matériel qui ne fait pas partie du dernier cri…
    Pour faire de la photo, point besoin d’avoir un boîtier sur-pixelisés et dopés aux « stéroïdes » !
    Cette course effrénée est lamentable.
    Et d’un point de vue esthétique, je préfère les clichés du siècle dernier aux « toiles cirées » actuelles qu’aucun œil humain n’observe ainsi !
    Notre société ne sait vivre que d’esbroufe et de bling-bling.

  2. Très intéressant ces graphiques qui remontent à 1979. Ils illustrent quelque chose que je soupçonnais sans pouvoir l’établir : le marché photo reste historiquement haut, même en volume. Le pic (la bulle ?) lié à la numérisation du marché n’était pas soutenable. Et puis, n’oublions pas qu’il se vend des centaines de millions de smartphones chaque année qui permettent de faire des photos très correctes. Cela ne fait sans doute pas les affaires des constructeurs traditionnels, mais les photographes n’ont jamais eu autant d’outils à leur disposition.