Yoshi Takata, un regard sur Paris

Yoshi Takata, né au Japon en 1916, se vouait à une carrière de journaliste. Mais une rencontre avec l’un des photographes japonais les plus connus Ihei Kimura la fît découvrir la photographie. Arrivé à Paris en 1954, elle explore la capitale française et affine sa pratique photographique. Dès lors, la photographe s’évertue à capturer des scènes de rue poétiques, dans la branche de la photographie humaniste.

Peu connue en France, la galerie Thaddaeus Ropac du Marais propose de (re)découvrir le travail de la photographe Yoshi Takata. L’exposition photo Un Regard Sur Paris, qui se termine le 23 avril, permet d’apprécier les tirages de cette talentueuse photographe. L’occasion de revenir sur le parcours de cette femme qui quitta le Japon dans les années 50 et posa ses valises à Paris pour ne plus jamais la quitter.

Yoshi Takata
Portrait de Yoshi Takata

De Tokyo à Paris

Bien que la plupart de ses clichés aient été pris des années 50 à 70, les photographies de Yoshi Takata se distinguent par leur étonnante modernité, à l’image de leur auteur.

Née en 1916 à Yusima Mikumi-cho près de Tokyo (Japon) dans une grande famille d’industriels, Yoshi Takata fait preuve d’une liberté d’esprit et d’une émancipation avant-gardiste au regard de sa culture et de l’époque. Elle décide de travailler, suit une formation de journalisme et intègre à Tokyo l’Agence France Presse en 1947 comme assistante interprète. Elle y fera des rencontres décisives, celle de Robert Capa mais surtout de Ihei Kimura qui l’initiera à la photographie. À sa demande, elle l’accompagnera à Paris où elle s’établira à son tour comme photographe.

Yoshi Takata
Religieuses au jardin du Luxembourg, 1958 © Yoshi Takata

Au plus près de la photographie humaniste

Sous l’influence des photographes que l’on nommera plus tard humanistesBrassaï, Henri Cartier-Bresson, Robert Doisneau ou Édouard Boubat – elle exerce à Paris son regard et sa maitrise technique. C’est surtout dans des scènes du quotidien que la poésie réaliste de Yoshi Takata éclot. La jeune femme n’hésite pas à insuffler de l’humour dans ses prises de vue comme avec son portrait de Mimile le charbonnier (1959) ou son portrait d’agriculteurs devant les tirages photos de leur bétail pris à l’occasion de la foire agricole.

Les bouchers, 1962 © Yoshi Takata

Dans la ville Lumière, Yoshi Takata ne s’arrête pas aux clichés, elle cherche plutôt à capturer l’incongru. C’est peut-être cette légère distance, sa posture d’observatrice étrangère devenue parisienne qui la distingue de ses amis et contemporains.

Picasso et Jacqueline à Cannes, 1960 © Yoshi Takata

Yoshi Takata, confidente des artistes et photographie de mode

Yoshi Takata a photographié les artistes et célébrités de l’époque dans un cadre intime ou plus formel. Ses archives rassemblent les portraits du peintre Fujita dans son atelier, de Marlene Dietrich sur scène, de Pierre Cardin au travail dans son atelier, d’Alberto Giacometti ou de Gloria Swanson. Son silence et sa discrétion permettent à la photographe de s’effacer, de se faire oublier pour saisir son sujet dans un instant de naturel absolu.

Pierre Cardin collection, 1966 © Yoshi Takata

Confidente et collaboratrice du couturier Pierre Cardin, Yoshi Takata organise pour lui son premier voyage au Japon tandis qu’il l’encourage à se lancer dans la photographie de mode. Elle y excellera tout en continuant jusqu’à sa disparition en 2009 de photographier son cercle proche comme ceux croisés au hasard de ses pérégrinations parisienne. Sa photographie de mode bénéficie de sa liberté d’esprit. L’émancipant des studios photo, Yoshi Takata préfère rester fidèle à son goût pour la photographie de rue emmenant modèles et créations haute couture dans la rue ou au cœur de chantiers de construction, captant la magie de l’inattendu sur sa pellicule.

Yoshi Takata
Un regard sur Paris, 1955—1987, Thaddaeus Ropac Paris Marais – Courtesy Pierre Pelegry © Yoshi Takata

Exposée à Tokyo pour la première fois en 1975, Yoshi Takata a depuis été mise à l’honneur par des institutions françaises et nippones. La Galerie Thaddaeus Ropac prolonge cet hommage jusqu’au 23 avril, rassemblant ses tirages de 1955 à 1987. Une exposition virtuelle permet à un plus large public de découvrir ces images.

Informations pratiques :
Yoshi Takata, Un regard sur Paris
Galerie Thaddaeus Ropac Paris Marais
Du 2 mars au 23 avril 2022
7 Rue Debelleyme, 75003 Paris
Du mardi au samedi, de 10h à 19h
Entrée libre