« L’Émoi photographique », le festival photo d’Angoulême, présente en tout le travail de 23 photographes en 13 lieux d’exposition jusqu’au 30 avril 2017. Cette année, le thème s’est attaché à « l’Histoire et aux petites histoires ».
Parmi les photographes exposés, 3 sont des invités dont les travaux illustrent le thème de l’année : Warren Sare et son travail sur les tirailleurs sénégalais du Burkina Faso et du Bénin, Jean-Daniel Guillou et son reportage sur l’association « Pour les yeux du monde » et Jean-Michel Leligny et sa série sur les femmes à la quarantaine. Les 20 autres photographes sont des participants sélectionnés via l’appel à candidatures et qui pour la plupart n’ont jamais été exposés.
Parmi ces lauréats, on trouve la série particulière du duo d’artistes surnommé « Anna Bambou » désignant un personnage fictif issu d’un fait divers. Ce personnage d’Anna est né de la rencontre entre Sabrina, photographe et réalisatrice, et Marianne, réalisatrice et conceptrice de projet qui ont décidé de collaborer ensemble sur ce projet dès 2010.
À la source de ce projet mêlant réalité et fiction on y trouve une simple histoire de faits divers à propos d’une jeune femme ayant disparu un soir dans un village du Sud de la France, ce qui marque beaucoup les habitants. Au cours d’un séjour sur les lieux, les deux artistes essayent d’en savoir plus et finissent par se rendre compte que bien que tous les habitants se rappellent de la même femme, leurs témoignages sont très différents et peu concordants.
Sabrina et Marianne crée alors tout un personnage, mi-fictif mi-réel, à partir des anecdotes que leur racontent les locaux, qu’ils l’aient plus ou moins ou prétendument connue. Cette femme devient Anna Bambou, aux personnalités aussi diverses que de personnes qui semblent se souvenir d’elle.
Chacune des séries photo élaborées par les deux artistes repose sur la trame de fond d’une histoire racontée par un habitant à propos de cette femme. Les photos représentent alors ce personnage, joué par Sabrina et Marianne elles-mêmes, dans chaque scène décrite par ceux qui disent l’avoir rencontré, tout en dépeignant l’une de ses facettes qui auraient marqué la personne. Que ce soit dans un hôtel-restaurant, sur un quai de gare, dans un salon de coiffure ou au détour d’un rendez-vous, Anna Bambou est partout et hante les pensées. Une chose est sûre : un peu sauvage et libre, elle semble marquer les esprits par son mystère.
C’est ce que l’on peut voir dans l’une des séries de ce projet, « Âmes-soeurs toxiques », qui met en scène le personnage d’Anna Bambou en se basant sur l’histoire d’un homme, Dean Moriarty (les noms ont été changés), qui montre une lettre que cette femme lui aurait écrite après l’avoir quitté. Ici les portraits représentent « Anna Bambou » coiffée de baies rouges, symbole des fleurs rouges qu’aurait apportées la femme de l’histoire à Dean Moriarty à chacun de leurs rendez-vous.
Avec ce projet, Sabrina et Marianne cherchent à explorer les thèmes de la mémoire, de sa fragilité et de la façon dont des événements banals peuvent se métamorphoser en ce que l’on pense être des expériences et des ressentis personnels.
N’hésitez pas à aller faire un tour au festival photo d’Angoulême si vous le pouvez, et à jeter un oeil sur le site d’Anna Bambou.