Spencer Tunick est un photographe américain à l’ambition démesurée et dénudée qui a su en faire sa marque de fabrique. Né en 1967 aux Etats-Unis à Middletown, il est diplômé en 1988 d’un Bachelor en Arts de l’Emerson College de Boston et intègre ensuite l’International Center of Photography de New-York. Il fait de la Big Apple son premier terrain de jeu et explore la thématique du nu dans l’espace urbain au travers de la photographie.
Le travail de Spencer Tunick est controversé, bastion de l’art contemporain ou héritage de la renaissance remis au goût du jour par la photographie, les avis des critiques divergent. Quel que soit le point de vue adopté, le projet de Spencer Tunick dérange. Il utilise la ville, un espace public et complètement anonyme, pour en détacher une silhouette nue que personne ne peut ignorer. Le photographe brise les codes de l’intimité et de la pudeur pour célébrer le corps ordinaire et offrir un nouveau regard sur l’Autre, à une époque qui glorifie la retouche et le « body sculpting ».
Se concentrant sur l’individu à ses débuts, il a réalisé « Nation States », un projet pour lequel il a parcouru les Etats-Unis et photographié son pays au travers des personnes qui acceptaient de poser pour lui dans des lieux propres à leurs villes. Spencer Tunick a été contraint de quitter New-York un certain temps suite à différentes arrestations à cause de la nudité de ses modèles dans l’espace public. Afin d’affirmer son travail de photographe et d’artiste, il a commencé à travailler sur des tableaux avec de nombreux sujets. La transition se fait en 1994 lorsqu’il photographie vingt-huit corps nus devant le siège des Nations-Unies, il décide à partir de ce moment-là de faire de sa photographie une performance artistique et une installation humaine.
Déroutante, la silhouette dénudée fondue dans la masse se fait davantage accepter et c’est progressivement que Spencer Tunick s’impose dans le milieu de l’art et rejoint la normalité. Son travail offre une réflexion sur la nature et la culture, il photographie hommes et femmes nus dans des lieux emblématiques de grandes métropoles mondiales, sa plus grande performance est à Mexico en 2007 avec 18 000 personnes.
Spencer Tunick réalise ses photographies la plupart du temps au lever du jour. La participation se fait selon les aspirations de chacun à poser nu. Il recrute ses modèles en distribuant des flyers dans les jours qui précèdent la date prévue pour sa performance et parfois également à partir d’une campagne lancée depuis son site internet. C’est ce qu’il a fait récemment pour le travail réalisé à Hull en Angleterre, une commande pour célébrer sa désignation de « UK City of Culture 2017 ». Spencer Tunick a rendu hommage au passé maritime de la ville en demandant aux 3 200 personnes volontaires de se peindre en bleu et vert, donnant à l’aurore une dimension d’Avatar et une fois tous les corps regroupés et positionnés, celle du flot de l’océan.
Ce travail de masse n’est pas aussi simple qu’il n’y parait. Spencer Tunick demande de nombreux détails à ses participants, comme leur pigmentation de peau ou leur taille, pour les rassembler et leur attribuer une couleur qui aura le même ton sur tous les corps. Alors que la nudité se rapporte la plupart du temps aux dimensions sexuelles et charnelles, la photographie de Spencer Tunick n’est en aucun cas érotique ou tendancieuse mais une invitation à l’affirmation de son corps et à se déjouer des préjugés de la société.
Une célébration de l’ordinaire et un appel au vivre ensemble le temps d’une performance, c’est ce que Spencer Tunick perfectionne au fil des années et réinvente pour chacun de ses projets.
Retrouvez les œuvres de Spencer Tunick, individuelles ou collectives, sur son site internet et laissez-vous attirer par ses propositions artistiques et photographiques contemporaines qui, finalement, replacent l’humain dans son état le plus primitif.