JO Paris 2024 : quand les athlètes se dédoublent grâce à l’exposition multiple

Comment retranscrire tous les mouvements d’un athlète… grâce à une photographie statique ? Sur plusieurs images des Jeux Olympiques de Paris 2024, les sportifs semblent reproduits plusieurs fois… en une seule image. Ici, aucune illusion d’optique, mais une technique photographique très pertinente : l’exposition multiple (multiple exposure, en anglais). Découverte.

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L’exposition multiple, ou l’art de décomposer le mouvement

Depuis le début des JO, les photographes de sport – et les réalisateurs d’OBS, la filiale média du CIO – ne cessent de nous impressionner avec de superbes images. Parmi les techniques les plus marquantes, on retiendra les replays en 3D façon « bullet time ».

Mais une autre technique est également mise à l’honneur durant les Jeux de Paris, lors des replays et par les reporters : l’exposition multiple. Le photographe ne cherche pas seulement à « figer » l’instant, mais aussi à restituer toutes ses évolutions – y compris les plus fugaces. Le principe : l’appareil photo est déclenché en rafale (avec une cadence très élevée, souvent 20 i/s voire au-delà, ainsi qu’une vitesse d’obturation très rapide).

Précision importante : le cadre ne varie pas – ou de manière imperceptible. Au post-traitement, il suffit au photographe de conserver les « étapes » les plus impressionnantes, et de les aligner en une seule image composite. À la clé : une restitution impeccable des différentes phases de la performance athlétique en une seule image.

Sur le cliché ci-dessus, la gymnaste américaine Simone Biles est « démultipliée » grâce au photographe Nick Didlick. Le mouvement de l’athlète peut être lu de droite à gauche, et décompose ses mouvements à la perfection.

Au-delà de la prouesse sportive, on notera aussi que la gymnaste n’est jamais « collée » à elle-même, quelques pixels séparant les bras et les jambes de ses différentes « versions ». Incidemment, on apprend que le photographe Nick Didlick a employé un Sony A9 III (lire notre test) pour la capture de cette image – ainsi qu’un téléobjectif Sony FE 600 mm f/4 GM OSS.

La finale du 100 mètres décomposée en une exposition multiple de 8 étapes

Sur cet autre cliché, la finale du 100 mètres masculin est décomposée en 8 étapes, du départ à l’arrivée de la course. On notera l’alignement parfait du photographe Hector Vivas avec la piste d’athlétisme, permettant une lecture de haut en bas du cliché. Et le résultat, particulièrement marquant, permet d’observer l’infime écart entre le coureur américain et son collègue jamaïcain (à peine 5 millièmes de seconde !).

On notera que Hector Vivas semble être un grand fan de l’exposition multiple (et des images composites). Son extraordinaire cliché du coucher du soleil devant la Tour Eiffel lors d’un match de volleyball féminin fait déjà partie des annales des JO de Paris. Mais en regardant de plus près, les sportifs ont (là aussi) semblent s’être multipliés sur le terrain, chaque équipe comptant près de 20 joueuses sur le terrain !

Multiple exposure et effet circulaire

Bien sûr, cette technique n’est pas réservée aux mouvements se déroulant sur un seul axe (A → B). Elle peut aussi être employée avec succès sur une image où le sportif reste « sur place ». Sur certaines images, la superposition peut évoquer l’effervescence du moment, formant une allégorie de l’effort déployé par l’athlète. Seule contrainte : il convient d’éviter que les différentes phases ainsi superposées ne nuisent pas à la lisibilité de la photographie finale !

De même, cette superposition peut créer un effet circulaire. Un point très intéressant notamment pour les épreuves de plongeon, notamment. Sur la photo ci-dessous, capturée lors des JO de Londres en 2012, la plongeuse Olena Federova semble dessiner une bulle, qui rappelle l’univers aquatique et forme une mise en abîme complexe.

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Certes, la technique de l’exposition multiple n’est pas nouvelle, mais elle prouve une nouvelle fois toute sa pertinence lors de ces Jeux Olympiques de Paris 2024. Et elle réussit à restituer le mouvement continu des athlètes en une image statique – l’un des aspects les plus complexes en photographie.