Beton Amer © Margot Lançon, Chloé Simonin

Ascendances, une réflexion autour des Droits Humains à la Fondation MRO de Arles

La Fondation Manuel Rivera-Ortiz, dédiée à la photographie documentaire et sociale, propose « Ascendances », un programme centré sur les droits humains, dans un contexte où ils sont très souvent bafoués. Les artistes exposés interrogent les notions de droits humains et d’égalité, et rappellent leur universalité. À découvrir jusqu’au 24 décembre 2022.

Arizona 2 © Florent Meng Lechevallier

Droits humains et universalité

« Ascendances » rassemble une quinzaine d’artistes et leurs propositions autour de la thématique des droits humains. Ces derniers, intrinsèquement corrélés à la définition de l’universalité, sont théoriquement inaliénables et applicables sans distinction de race, de sexe, de nationalité, d’origine ethnique, de langue, ou de religion.

Pourtant, de frontières en frontières, les distinctions, voire les discriminations se multiplient, notamment en termes de genre et d’origine ethnique. Les questions autour de l’identité ne cessent d’être discutées et mise en tension. Un point qu’accentue la forte polarisation actuelle des discours politiques et médiatiques. De même, malgré les nombreuses avancées, certaines distinctions liées au genre sont encore appliquées au regard du droit.

Irrawady River2 © Isabelle Ha Eav

Sortir de l’anthropocentrisme

Photographe, designer et éditrice, Francesca Todde explore dans ses recherches les relations entre l’Homme et les animaux, à revers d’une démarche anthropocentrée. A travers l’image, l’artiste revient sur l’appartenance de l’Homme au règne animal et aux codes qu’ils peuvent encore partager bien qu’ayant des identités différentes. On perçoit dans les clichés les signes d’une histoire commune et d’êtres qui se retrouvent et partagent un environnement en mal de ressources.

Francesca Todde pousse ainsi à la réflexion sur une relation Homme-animal qui pourrait sortir d’une perspective de domination et d’exploitation. Avec « La Nation Subtile », l’artiste nous amène à requestionner le concept de nature humaine sur lequel se fonde le droit universel.

Græmvej, Husby (Ulfborg), Denmark, 17-7-2017 © Francesca Todde

Les migrations sous un autre angle

Par ailleurs, la collaboration entre la Fondation Manuela Rivera-Ortiz et la Fondation Act on your future a permis de sélectionner et présenter les travaux de 13 artistes émergents, finalistes ou lauréats du Prix de photographie des droits humains.

BONU BURRË! © Pierre-Kastriot Jashari

Laurence Rasti et Pierre-Kastriot Jashari ont tous deux travaillé sur des propositions autour de l’exil de personne homosexuelles déchirées entre une volonté de s’affirmer au grand jour et le besoin de se protéger des menaces et de la violence. De la Turquie à l’Albanie, ces deux perspectives nous ouvrent les portes d’une réflexion sur les migrations forcées et les discriminations fondées sur l’orientation sexuelles, encore trop nombreuses.

 There Are No Homosexuals in Iran © Laurence Rasti

On observe la migration sous un autre angle avec Margot Lançon et Chloé Simonin, qui mettent en lumière le moment de l’arrivée dans le pays d’asile et d’installation. On suit Yerusalem, jeune femme érythréenne réfugiée politique en Suisse, et les paradoxes de son intégration.

Yerusalem © Margot Lançon, Chloé Simonin

Le programme « Ascendances » s’empare également du thème de la frontière et du contrôle. Florent Meng Lechevallier dévoile en ce sens des clichés capturés à la frontière de l’Arizona aux U.S.A, et rend compte du combat des personnes qui viennent en aide aux migrants et qui recensent les disparitions, malgré les intimidations dont elles font parfois l’objet.

Arizona 1 © Florent Meng Lechevallier

Pour compléter ces réflexions sur les migrations et les droits humains, Isabelle Ha Eav présente un livre regroupant 14 poètes birmans et rohingyas et 6 photographes, tous exilés, emprisonnés ou assassinés par les forces armées depuis le coup d’État de février 2021.

Des travaux critiques sur l’ère de l’accumulation et de la post-vérité

La photographie documentaire se mêle ensuite à la fiction dans l’œuvre de Joanne Joho et Thomas Yaël Lopez qui construisent un scénario dystopique avec All inclusive, une agence de voyage inventée qui proposerait des destinations extraterrestres aux habitants d’une planète éteinte. Les artistes nous emportent ainsi dans une perspective critique sur la nature humaine et la recherche perpétuelle de croissance et de divertissement caractéristique de la société contemporaine.

VPC 2 © Joanne Joho et Thomas Yaël Lopez

Younès Klouche, Leslie Moquin et Guillaume Delleuse proposent eux aussi, chacun dans des thématiques différentes, des visions critiques sur la société et ses sphères politiques et médiatiques. Zoé Aubry traite quant à elle du féminicide comme le symptôme d’une violence sociale systémique. Elle redonne aux victimes une identité et une histoire, alors même qu’elles sont souvent rendues invisibles, nichées derrière des récits de « crimes passionnels » ou de « drame familial ».

WM Work Master Diplome 2020 © Zoe Aubry

Dorian Sari, avec son travail Look, nous rappelle à quel point la saturation d’information dont nous faisons l’objet nous emmène dans les tréfonds de l’univers de la post-vérité et des fake news. Il nous ramène ainsi à un point fondamental lorsqu’on parle de droits humains : celle de l’attention aux détails, aux faits réels.

La programmation « Ascendances » nous emporte ainsi au croisement de la photographie documentaire et de la fiction et nous laisse un message fort : il y a encore beaucoup de chemin à parcourir afin de garantir le respect des droits humains, leur universalité et la nécessité l’acceptation de l’autre dans sa différence.

Informations pratiques :
Ascendances
Fondation Manuel Rivera-Ortiz
Du 29 octobre au 24 décembre 2022
18 Rue de la Calade, 13200 Arles
Du mardi au dimanche, de 11h à 18h
Tarif : à partir de 6 €