Mise à jour : l’exposition en France terminée, vous pouvez la retrouver du 3 septembre au 21 septembre 2018 au Palais des Nations à Genève (Espace Communal, Bâtiment E, 2e étage, Porte 40). Un finissage aura lieu le lundi 17 septembre 2018 à 12h30 en présence de Lara-Scarlett Gervais, Staffan de Mistura, Michael Moller, Directeur Général de l’Office des Nations Unies à Genève et Abdulaziz Almuzaini, Directeur du Bureau de liaison de l’UNESCO à Genève. Inscription obligatoire pour visiter l’exposition.
Du 20 février au 25 mars 2018, la photographe Lara-Scarlett Gervais expose au Musée d’Angoulême son travail sur le massacre patrimonial exercé par les forces islamistes en Syrie et en Irak. L’exposition Alâthar : seul(e) après Daesh est le récit photographique poignant d’une amoureuse du patrimoine culturel antique qui souhaite nous alerter sur le péril de ces rares reliques du passé.
Après des études d’archéologie à la Sorbonne et à l’Ecole du Louvre, Lara décide finalement de se tourner vers le monde de la photo : « La photographie a toujours été pour moi un support dans mes différents voyages. Cela me permet d’immortaliser et de figer certains moments » nous explique l’artiste.

Cette activité est devenue ensuite un travail à plein temps pour Lara Scarlett Gervais qui est entrée l’an passé à l’agence Sipa Press. Créée en 1973 par le journaliste et photoreporter turc Gökşin Sipahioğlu, elle réunit plus de 1 000 correspondants et diffuse plus de 12 000 photographies par jour.
C’est à travers ses voyages que Lara mesure progressivement la force de ses photographies : « Sans m’en rendre compte j’ai réalisé un travail de mémoire. J’ai alors décidé de partager ce travail, en organisant des expositions. » Ainsi, la photographe arpente les Balkans et le Moyen Orient loin des hôtels 5 étoiles et des clubs de luxe pour touristes mais au plus proche des populations. « En voyageant au contact des populations locales je me suis passionnée pour l’ethnologie et la photographie. Je laisse les rencontres guider mes voyages. »

Et des rencontres, Lara en a fait régulièrement pendant ses périples. Contactée par Phototrend, elle nous raconte ses dernières années de voyage ainsi que le moment où elle a voulu aller en Syrie documenter les monuments historiques détruits par les islamistes : « Je devais me rendre à Mossoul en 2011, puis j’ai rêvé de Sarajevo alors je suis partie dans les Balkans où j’ai voyagé en stop et chez l’habitant. En mars 2016 de retour en Iran, un ami me propose de le rejoindre à Erbil pour l’aider à réaliser un documentaire sur les réfugiées de la plaine de Ninive en Irak. Lorsque j’arrive à Souleimaniye (dans le Kurdistan irakien) j’ai pris un taxi collectif pour Erbil. Je rencontre alors un Syrien originaire de Damas qui me raconte son histoire d’amour et me dit qu’il va se marier dans quelques semaines. Il me parle de Damas, je lui réponds que je veux y aller. Il me regarde et me dit non c’est la guerre, c’est dangereux. Je lui dis : si toi tu peux te marier là-bas pourquoi moi je ne pourrais pas y aller. Et voilà comment Damas est devenu mon objectif. »

En 2016, elle décide de partir 6 mois dans différentes villes et régions de Syrie et d’Irak, dont Lalesh, Homs, Damas, Safita, Alqosh et la tristement célèbre Palmyre, libérée en mars 2017 par les forces loyalistes (coalition du Moyen Orient contre l’EI). Personne ne l’a guidé ou renseigné sur l’itinéraire approprié à part les habitants du coin, avec pour seuls coéquipiers son Nikon D5000 et ses deux boitiers FujiFilm X-T1 et X100T.
Cela lui a permis de se rendre compte du quotidien des populations du Moyen Orient mais également de sympathiser avec tout le monde : « J’ai noué des liens très fort avec les familles qu’elles soient sunnites, chiites, chrétiennes, yézédis, ismaéliens, alaouites, kurdes… »

Que ressent-on devant les dégâts commis par les djihadiste ? « Face à ces vestiges, j’ai ressenti de l’incompréhension » nous répond Lara. A Palmyre, site archéologique de l’ancienne ville de Tadmor dans le désert de Syrie, la photographe a vécu un moment avec les archéologues le temps de visiter et d’immortaliser le site. Selon la Bible, Salomon lui-même aurait construit la ville, point de passage stratégique pour se rendre à Damas, en Phénicie et en Egypte. Ainsi, cette oasis très prisée est rapidement passée entre les mains des Grecs puis des Romains avant d’intégrer l’empire arabe. Grâce à toutes ces civilisations que la ville a accueillies, le patrimoine culturel émanant des juifs, des polythéistes greco-romains, des chrétiens et des musulmans s’est accumulé, attirant les foudres de l’EI (Etat Islamique).
De retour en France, Lara-Scarlett Gervais a monté cette exposition avec le musée d’Angoulême, avec pour nom Alâthar : seul(e) après Daesh. Alâthar signifie archéologue en arabe : « Je voulais un nom qui me rappelle ce voyage » nous confie l’artiste. « C’est un des premiers mots que j’ai appris. »

Parallèlement, Lara-Scarlett Gervais fonde l’association Heritage et Civilisation qui sensibilise les populations aux patrimoines anciens et les aide à agir concrètement sur le terrain pour sa sauvegarde. « Montrer mon travail photographique ne pouvait avoir un intérêt que s’il servait concrètement à défendre une cause. J’ai donc décidé de fonder l’association Héritage et Civilisation au même moment que j’ai travaillé sur la préparation des expositions sur le patrimoine en danger. »
Grâce aux experts français, Heritage et Civilisation forme les équipes sur le terrain, restaure et conserve le patrimoine, collecte des informations, organise des conférences et des expositions pour sensibiliser le public le plus large possible. Un exemple concret d’intervention : « Nous sommes actuellement en train de travailler sur une mission d’évaluation pour pouvoir aider à la reconstruction d’une église à Mossoul. L’association a vocation à aider toutes les communautés. »

Lara va donc multiplier les expositions pour que nous n’oublions pas ce patrimoine en péril. Vous pourrez la retrouver à Angoulême du 20 février au 25 mars, puis à Paris au 23 avenue d’Iéna du 9 au 17 mars pour l’exposition Mémoires Vives et enfin au Press Club de France du 28 février au 30 mai 2018.
N’hésitez pas à visiter son site pour suivre ses aventures ainsi que son profil Instagram. Pour en savoir plus sur l’association Heritage et Civilisation, rendez-vous sur le site de l’association et sur Instagram.