Zoom Photographe : Max Dupain

Pauline est la créatrice du webzine culturel The Arts Factory Magazine.

Voilà un artiste de l’autre bout du monde. Max Dupain est né la tête à l’envers en 1911 à Sydney, en Australie. En peu de temps, ses photos deviennent emblématiques, symboles de la culture australienne, ce nouveau pays. Dupain se voit rapidement offrir une reconnaissance artistique bien au-delà de l’ile océanique.

Pourtant, rien d’artistique au départ, Max Dupain commence sa carrière en travaillant sur commande pour le gouvernement australien, photographiant les nouveaux bâtiments dans le but de vendre l’image d’un pays neuf, en construction. Il s’intéresse alors aux structures architecturales et se plait à faire interagir les courbes et les lignes dans ses photos.

Sydney Opera House en construction, 1969
Sydney Opera House en construction, 1969

La salle de concert de l'opéra de Sydney en construction, 1968
La salle de concert de l’opéra de Sydney en construction, 1968
L'ambassade australienne à Paris, 1978
L’ambassade australienne à Paris, 1978

Max Dupain a commencé la photographie très tôt, à 13 ans. Il gagne à 17 ans un prix au nom surprenant : « The Carter Memorial Prize for Productive Use of Spare Time », le Carter Memorial pour l’utilisation productive de temps libre. Un an plus tard, il devient membre de la société photographique de l’état du New South Wales (où se trouve Sydney, entre autre). Il y rencontre une légende de la photographique australienne réaliste, Harold Cazneaux, de 33 ans son ainé.

Il est intéressant de voir l’évolution de son travail qui suit l’évolution de l’utilisation de l’appareil photo. En effet, c’est à cette période là que l’on commence à penser art à travers le médium. Plutôt que de photographier ce que l’on voit, on commence à photographier ce que l’on pense voir. C’est l’œil du photographe et son interprétation qui rentre en jeu et s’amuse avec des caractéristiques nouvelles.

Dans la théorie réaliste, on parle de « l’honnêteté de l’appareil photo » car on n’intervient pas sur l’appareil : il capture ce qu’il voit. Dans la théorie moderniste, celle dont fait partie Max Dupain, on ajoute des caractéristiques artistiques comme le cadrage, l’angle et la composition qui créent une histoire, mettent en scène un détail, on réfléchit à la lumière et à l’exposition…

Untitled (Nude torso in sunlight), 1941
Untitled (Nude torso in sunlight), 1941

A travers la photographie moderne, Dupain tranche avec la photographie documentaire, à but social, historique ou scientifique pour se diriger vers des clichés modernes emprunts de la réalité du photographe. On commence ainsi à s’intéresser à la photographie comme un art, comme la possibilité de capter un moment, un objet ou un paysage de façon artistique.

Dupain joue avec les plans, floute les seconds, trouve des angles qui interpellent sur les lignes et les courbes, met en évidence la lumière sur les objets et les corps. Le photographe se concentre sur ses sujets de prédilection, les paysages, l’architecture et ce qui le rendra connu : la plage et ses nus. C’est toute une culture qu’il met en évidence.

Sunbaker, 1937
Sunbaker, 1937

Dupain gagne en célébrité dès 1937 avec l’image du Sunbaker sur la grande plage de Sydney, Bondi Beach. Le sujet a son importance, son activité également et surtout, l’angle de prise de vue. Un homme musclé bronze au soleil. On ne voit que sa tête, ses épaules et ses mains. Il semble à l’aise, la tête posée sur ses mains. Sans serviette, il fait un avec le sable, avec la nature. La plage, partie intégrante de la vie des Australiens, évoque leur laisser-vivre et leur lifestyle. Le nom de la photo est également bien de là-bas: le Sunbaker, mot utilisé en Australie et en Nouvelle Zélande contrairement aux pays anglophones de notre côté de l’hémisphère qui utilisent le terme sunbather, pour décrire celui qui prend un bain de soleil.

C’est un tournant de la photographie et l’on entrevoit l’infinité des possibilités qu’offre l’appareil photographique, possibilités en partie étudiées jusqu’aujourd’hui.

Max Dupain meurt en 1992, travaillant encore comme photographe jusqu’aux derniers instants, à 81 ans. Il est parti en lançant le processus d’acceptation de la photographie comme art. Et c’est en effet dans les années 80 que la photographie prend sa place – la 8ème – dans la classification des arts. On rappelle que la date conventionnelle de l’invention de la photographie est 1839. Il en aura fallu, du temps et des précurseurs du Down Under.

At Newport, 1952
At Newport, 1952
Course de surf, 1940
Course de surf, 1940
At Bondi, 1939
At Bondi, 1939